La découverte de nombreux récits
attestant l'existence de divinités féminines, Créatrices de l'Univers, fut pour
moi une révélation surprenante. On attribuait à ces divinités, non seulement la
naissance du premier peuple, mais la création de la terre entière et des cieux
qui la recouvrent. On retrouve la trace de l'existence de ces Déesses à Sumer,
à Babylone, en Égypte, en Afrique, en Australie et en Chine.
En Inde, on honorait la Déesse Sarasvati
qui avait inventé le premier alphabet, et en Irlande celtique, la Déesse Brigit
était considérée comme la patronne du langage.
Certains textes nous apprennent qu'à
Sumer, c'est à la Déesse Nidaba qu'on attribuait l'invention des tablettes
d'argile et de l'art de l'écriture. Elle était vénérée longtemps avant les
autres divinités mâles qui L'ont supplantée par la suite. Le scribe officiel du
panthéon sumérien était une femme; et ce sont les tous premiers exemples
d'écriture que l'on a retrouvés qui présentent les évidences archéologiques les
plus significatives. Ils ont été découverts également à Sumer, dans le temple
de la Reine du Ciel à Érech, et datent de plus de cinq mille ans. Bien qu'on pense généralement que l'écriture est une
invention de l'homme, l'ensemble des informations ci-dessus nous offre un
argument des plus convaincants pour prétendre que ce fut probablement une femme
qui traça dans l'argile humide les premiers idéogrammes.
Il est reconnu que le développement de
l'agriculture, activité qui prolongeait le travail de cueillette, est le fait
des femmes. En accord avec cette théorie, on retrouve partout des divinités
féminines à qui l'on attribuait ce cadeau fait à la civilisation. En
Mésopotamie, où l'on trouve les premiers signes d'un développement agricole, on
adorait la Déesse Ninlil qui avait transmis à Son peuple la connaissance du
processus des semailles et de la récolte. Dans presque toutes les régions du
monde, des divinités féminines étaient vénérées pour leurs vertus de
guérisseuses; c'est à Elles qu'on devait les herbes, les plantes, les racines
médicinales et autres remèdes, et c'est pourquoi les prêtresses de leurs
sanctuaires jouaient le rôle de médecins envers les fidèles.
Certaines légendes décrivent la Déesse
comme une forte et valeureuse guerrière, dirigeant ses troupes au combat. C'est
ce dernier trait de la Déesse qui semble être à l'origine des nombreux récits
de femmes guerrières, que les Grecs de la période classique nommaient des Amazones.
Si l'on examine en détail les récits qui témoignent de l'estime que les
Amazones avaient pour cette Déesse guerrière, il apparaît clairement que ces
femmes s'adonnaient à la chasse et à la guerre en Libye, en Anatolie, en
Bulgarie, en Grèce, en Arménie et en Russie. Nous sommes bien loin des mythes
fantaisistes auxquels bien des auteurs contemporains ont voulu nous faire
croire.
Je ne peux m'empêcher de remarquer à
quel point la mentalité de l'époque préhistorique et celle des tout débuts de l'histoire sont éloignées des conceptions
contemporaines en ce qui a trait aux capacités intellectuelles des femmes. En
effet, presque partout, la Déesse était considérée comme une sage prophétesse
et une conseillère avisée. Dans les légendes pré-chrétiennes d'Irlande,
Cerridwen, la Celte, était Déesse de l'Intelligence et de la Connaissance. Dans
les sanctuaires de la Grèce pré classique,
les prêtresses de Gaia dispensaient la sagesse de la révélation divine, tandis
qu'on invoquait la grecque Déméter et l'égyptienne Isis lorsqu'il s'agissait de
légiférer, d'obtenir des conseils ou de rendre la justice.
En Égypte, Maat représentait l'ordre, le
rythme et l'intégrité de l'univers. En Mésopotamie, Ishtar était le Guide du
Peuple, la Prophétesse, la Reine du Futur; et dans la ville de Nimroud où l'on
vénérait Ishtar, les recherches archéologiques ont démontré que des femmes
détenaient les postes de juges et de magistrats à la cour.
Les
mythes véhiculent certaines idées qui orientent notre perception des choses et
conditionnent notre pensée, et même notre sensibilité, d'une manière bien
particulière. Ils agissent encore plus fortement sur nous lorsque nous sommes
jeunes et impressionnables.
Ils mettent en scène des personnages qui
ont été récompensés ou bien punis pour leurs comportements, et nous apprenons à
voir en eux des exemples à suivre ou à éviter. Combien d'histoires nous a-t-on
raconté dans notre plus jeune âge, qui
ont profondément influencé nos comportements et notre compréhension du monde et
de nous-mêmes? C'est à partir de ces fables et de ces paraboles entendues au
cours de notre enfance que nous avons développé une éthique, des notions de
morale, une conduite, des valeurs, un sens du devoir et même un sens de
l'humour.
C'est à travers ces contes, reflets de
notre société, que nous avons appris ce qui est socialement accepté. Pour ceux
qui leur accordent une signification, les mythes définissent le bien et le mal,
ce qui est juste et ce qui est injuste, ce qui est naturel et ce qui est contre
nature. Il est donc évident que les mythes et les légendes issus d'une religion
où l'on vénérait des divinités féminines pour leur sagesse, leur courage, leur
force et leur sens de la justice présentaient une image de la féminitude bien
différente de celle que nous offrent aujourd'hui les religions à dominance
masculine.
EXTRAIT
DE QUAND DIEU ETAIT FEMME de Merlin
STONE "La découverte de la Grande Déesse, source du pouvoir des
femmes".
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