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jeudi 1 octobre 2015

La voie de l’art, un chemin sensoriel d’exploration créative pour aller vers Soi




La pratique de l’art, sous quelque forme que ce soit, amène l’être humain dans un mode d’expression qui lui est spécifique, qui est sien, qui le révèle, qui lui révèle sa véritable identité.



Que nous soyons « acteur-créateur » ou « spectateur-récepteur », lorsque nous nous confrontons à l’expression artistique quelle qu’elle soit, nous agissons. Tous nos sens s’éveillent. Nous plongeons alors dans notre espace intime où histoire personnelle, croyances, patrimoine familial, culturel, éducatif et religieux s’entremêlent et nourrissent notre création, notre perception. L’œuvre en question devient catalyseur d’émotions, de ressentis et de réflexions.

Pratiquant les arts plastiques depuis l’enfance, chaque fois que je me retrouve devant cet espace vierge, que je vais m’approprier avec la couleur, la terre ou tout autre matériau, des ressentis paradoxaux m’habitent : l’enthousiasme, la retenue, la crainte, l’audace, tous se bousculent jusqu’à l’instant du premier geste qui entame le processus créatif. En tant que thérapeute, je fais cette même observation. Présente et ouverte à la personne qui œuvre devant moi, je vois celle-ci faire se dérouler, par le biais de la couleur, du dessin, du modelage, de la mosaïque ou toute autre technique plastique, le magnifique fil créatif qui l’amène petit à petit à se connecter à qui elle est vraiment. 

Ce qui émane de chaque moment de création est un immense sentiment de plénitude, de lien profond avec l’essence même de la vie. Une vibration intérieure qui nous connecte avec qui nous sommes. (Lorsque je pratique le land art avec mes patients : cette observation devient extrêmement vive. La nature devient palette, matière, espace de création. Ce lien avec l’environnement naturel dynamise la créativité de la personne, la ramène à son essence pure, à son appartenance).

Le geste créatif quel que soit son support donne à l’être l’occasion de s’exprimer. L’âge ne rentre pas en ligne de compte, et pourtant. On observe la facilité avec laquelle un enfant s’abandonne à son potentiel créateur de manière déconcertante. Il laisse aller ses mains ; les couleurs, le trait, la matière, tout est exploré. Il n’y a de sa part aucun jugement. Il fait. Il découvre dans la joie et une sorte d’application : la rondeur des formes ou leur rudesse, la souplesse du trait ou sa fermeté, l’harmonie des couleurs mais aussi leur disharmonie, tout est prétexte à créer, à s’extasier. L’esthétique ne sera qu’une appréciation personnelle de ceux à qui il montrera son œuvre : « C’est beau, ce n’est pas beau ». 

En effet, l’esthétique n’est qu’un aboutissement subjectif. Certes, il peut contribuer à la restauration de l’image de soi mais avant tout, dans ce mode d’expression artistique, l’élan qui emmène la personne à donner d’elle, à se montrer, va contribuer à l’ouvrir à elle-même, à sa ressource créative. Durant ce moment de rencontre avec soi, le plus difficile à éviter est effectivement le jugement. Malheureusement bien des personnes se confrontent à cette étape : l’œuvre aboutie ne répond pas à une exigence de l’ego, à cette blessure narcissique contractée pendant l’enfance qui est restée là, béante, anéantissant tout désir d’expression et entraînant avec elle tous les dommages qui vont freiner l’épanouissement de l’être. 

La créativité, ne naît pas du talent, elle est engendrée par l’ouverture à soi-même. 

Le choix de la technique : peinture, dessin, modelage, collage, mosaïque, land art... émane du désir de la personne. Celle-ci va se sentir attirée et entrer en relation avec la technique qui va petit à petit la révéler. Puis va en découler cette ouverture à soi-même. Cette étape passe souvent par l’inévitable phase du rejet : « Comment ai-je pu produire cela ? ». C’est dans cette phase difficile que le patient a particulièrement besoin d’être soutenu en le confrontant à cette réalité : « Oui, c’est bien toi qui as créé cette œuvre, mais ton regard est filtré par ta blessure ! ».

Observer ce qui nous déplaît dans notre œuvre est comme prendre en compte cette part de soi qui est dans l’ombre. La regarder objectivement dans l’acceptation initie le processus de guérison. Et ce qui était sombre, désordonné, qui générait de l’aversion, du rejet, devient source de joie et d’épanouissement. « Je crée comme je le ressens, comme je le vis et c’est le plus important ! » La personne entre alors en amour avec la technique qu’elle fait sienne, elle la vit, elle respire avec elle, celle-ci l’habite quotidiennement, au-delà des séances de thérapie. La magie s’opère alors, le processus thérapeutique se met en place et la créativité se déploie. 

La créativité s’élève au-dessus de tout préjugé et exigences égotiques. La personne alors, en explorant tous « ses possibles », s’enrichit d’elle-même, de sa propre source.

Travaillant auprès de personnes déficientes, j’ai découvert au fil de ces douze années de pratique en institution combien l’art pouvait stimuler le désir, l’enthousiasme, puis générer la confiance et l’estime de soi. Que ces personnes soient contemplatives, ou qu’elles soient créatives pleines d’enthousiasme avec ou non du talent, que leur œuvre parte ou non pour une grande exposition internationale telle que celle proposée par « l’association My Heart » ; chacune d’entre elles se sera appropriée ces instants de créativité comme une part d’elle-même. 


L’universalité de l’art fait tomber toute frontière : chacun dans son processus créateur va donner de lui, de sa vérité. Ce message sera accueilli avec enthousiasme ou pas, mais il véhiculera avant tout la liberté d’expression, la liberté d’ÊTRE.

Martine VIOLLEAU 
Art thérapeute. Je travaille depuis 12 ans en institut médico-éducatif et exerce également en libéral où le rebirth, la gestalt, le travail psychocorporel et le rêve éveillé s’associent pour une approche global de la personne.
martineviolleau@yahoo.fr 

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