Raisons de la création de cette branche nouvelle
La tradition dianique de
la Sphinge est une et polymorphe. Elle est une tradition de la Wicca dianique,
et est inspirée des Mystères anciens,
fondamentalement ancrée dans le présent et résolument tournée vers l’avenir.
Officiellement fondée à
Yule 2007 par Hédéra et Hyouden, ainsi que l’ensemble du coven du Paradigme de
la Sphinge, elle était pratiquée depuis
plus longtemps sans s’être clairement définie. Devant les différences de plus
en plus marquées avec les autres traditions dianiques et de la Déesse en
général, il devenait nécessaire de reconnaître plus officiellement cette
branche nouvelle.
Pourquoi la Sphinge ?
La Sphinge est le féminin
de Sphinx, terme générique qui comprend souvent des sphinx féminins, surtout en
Grèce. Créature hybride, à la fois lion, aigle et à tête humaine, elle pose des questions mais n’y répond pas. Et
pourtant c’est une forme haute de sagesse ; gardienne traditionnelle de l’Arbre
de Vie en Orient et en Grèce, elle va et vient entre le monde des vivants et
celui des morts. Souvent représentée auprès des Grandes Déesses, elle leur sert
de messagère et est un prolongement de la divinité en jetant un pont entre
humains et divinités. C’est une figure ambiguë par excellence, dont on ne sait
jamais trop dire si elle est entièrement féminine ou masculine, pourtant elle
est indéniablement compagne des Déesses orientales ou chypriotes. Cette
ambiguïté souligne les aspects à la fois féminins et masculins de la Déesse, et
symbolise notre ouverture aux femmes comme aux hommes qui recherchent la voie
de la Déesse.
Femme et animal, elle se
meut dans le ciel, sur terre et dans les Enfers. Elle est garante de la sagesse
et de la connaissance, posant l’énigme de l’existence humaine. Contrairement à
la légende thébaine des patriarches, la sphinge n’est pas cruelle. En tant que
gardienne du savoir, elle comprend la nécessité de le défendre et anéantir
l’ignorance volontaire ainsi que l’obscurantisme. C’est ainsi qu’elle attaque
les voyageurs égarés sur les chemins de l’illusion et empêche les esprits
vulgaires de pénétrer sur son territoire.
Telle la sphinge, la
tradition sphingienne recherche la connaissance rigoureuse, stricte, argumentée
et scientifique, nécessaire à un cheminement en dehors des chimères (autres
créatures mythiques) de l’esprit. La Sphinge est chasseuse de chimères et ne
craint pas de pénétrer au-delà du voile du savoir et de l’expérience
initiatique. Ainsi, au sein de cette branche dianique, nous rejetons les mythes
présentés comme réalités historiques ou toute forme de déclaration à caractère
vérifiable présenté comme Vérité sans aucune explication ou argument. Nous
n’adhèrerons jamais à une logique (si on peut appeler cela ainsi) du : «C’est
comme ça parce que c’est comme ça. Un point c’est tout». Ces procédés conviennent aux sectes et aux dogmatiques,
non pas à d’authentiques aspirants à la voie et la pratique des arts de la
Déesse. A l’inverse, la tradition de la Sphinge valorise l’utilisation et la
compréhension des mythes comme dépôt universel de la psyché. Nous déclarons que nous n’avons pas besoin
des mensonges d’un passé idéalisé et ré-inventé pour justifier l’existence de
notre branche. De même, nous n’avons pas
besoin de brandir des martyrs en l’image de la sempiternelle chasse aux
sorcières, mise à toutes les sauces. Cela ne sert qu’à se présenter en
victimes, or, nous sommes invariablement libres et conscients de notre pouvoir.
Ainsi, des Amazones mythiques, nous sommes des porteurs de Lumières, les
Lumières du XVIIIè siècle, et nous nous reconnaissons comme humanistes.
Mixité et Dianisme
En tant que tradition
dianique, et par ailleurs dépositaire des enseignements de Shekhinah
Mountainwater, la branche sphingienne n’honore que la Déesse. Cependant, la
Déesse est pour nous porteuse, mère, et créatrice à la fois du féminin et du
masculin, aussi les deux principes sont toujours présents lorsque nous faisons
appel à la Déesse. Il n’est donc pas question de déséquilibre. Alors que
traditionnellement, on associe la lune et le principe passif à la femme, et le soleil et le principe
actif à l’homme, aucune distinction n’est faite. Notre tradition n’est pas «à
tiroirs». Conscients que nous ne sommes jamais qu’une association de toutes ces
qualités, femmes ou hommes, opérer une
distinction et une classification de ce qui est masculin ou féminin revient à
limiter un(e) enfant de la Déesse à n’être jamais entier en elle ou lui-même.
Par ailleurs, l’étude sur les genres, les gender studies qui nous
viennent des instituts américains, ont pu démontrer la différence fondamentale
entre genre et sexe. Comme le disait Simone de Beauvoir et d’autres avant elle
: «on ne nait pas femme, on le devient». Il en va de même pour les hommes. Les
distinctions traditionnelles hommes/ femmes reposent non sur des arguments
biologiques comme c’est souvent répété ad nauseam, mais
sur les attentes que la société a d’une femme ou d’un homme.
C’est ainsi que dans
d’autres parties du monde, des dieux sont lunaires et des déesses sont
solaires, des femmes sont chefs de famille dans une société matrilinéaire,
comme les Mosos de Chine. La nature n’a pas décidé ce que nous devions être,
sinon toutes les civilisations auraient les mêmes fonctionnements, les mêmes
visions des genres. Etant le produit de la société dans laquelle on grandit,
qui exige de nous certains comportements en en étouffant d’autres, c’est de
notre vraie nature dont nous sommes coupés. La Déesse ne voulait pourtant pas
cela ; elle a créé la Terre et l’univers dans la diversité, et n’a pas divisé
les espèces en féminin et masculin. Il existe des escargots hermaphrodites, des
hypocampes mâles qui portent les petits, des huitres qui changent de sexe au
cours de leur vie, des animaux qui se reproduisent par parthénogénèse
(d’eux-mêmes, sans intervention de sperme ou d’accouplement).
C’est ainsi que la Déesse
est une et multiple, derrière une volonté d’équilibre en clamant un Dieu
(Cornu) et une Déesse, il semblerait que cela ne fasse que renforcer cette
classification de genres et non pas permettre une réelle libération.
Schématiquement, le jour où un homme est libre d’être sensible et de pleurer,
et une femme est libre d’être forte et combattante dans la vie active, enfin on
se trouve dans la liberté de développer les qualités que nous possédons sans
préjugé de genres. C’est pour cela que contrairement à la plupart des
traditions dianiques, la branche sphingienne est mixte. Influencée par les
mystères anciens de Cybèle (célébrés par les hommes, fidèles à l’image d’Attis,
son jeune parèdre) ainsi que ceux de Dionysos (l’homme efféminé célébré par les
femmes, qui semble avoir été antérieurement une déesse arbustive), notre
tradition est ouverte à tous car nous considérons qu’il n’est plus l’heure de
rejeter les hommes, mais de partager et évoluer avec eux afin de créer de
nouveaux modèles de féminité et de masculinité, succédant à l’oppression des
femmes qui dura trop longtemps, et la
nécessaire révolte des années 70 dont nous sommes héritiers et qu’il faut à
présent réaliser d’une autre manière. Bientôt quarante ans après, dans un
contexte différent et des moeurs qui ont malgré tout bien évolué, le temps est
à la construction main dans la main.
Cérémonies et Initiation
La branche sphingienne
célèbre les huit fêtes saisonnières ainsi que les pleines lunes selon la
tradition dianique. L’initiation, équivalente à un premier degré, permet de
devenir Prêtre(sse) et Sorcier(re), puis l’ordination, équivalente à un second
degré, est accessible à celles et ceux qui souhaitent avancer dans la voie de
la prêtrise au sein de la communauté et s’ouvrir à la transmission du savoir,
donc à l’enseignement. L’ordonné devient alors Grand(e) Prêtre(sse). Dans les
deux cas, le rite se déroule au sein du coven et saurait difficilement être
opéré en solitaire, bien que la
tradition de la Sphinge reconnaisse les dédications et consécrations de
personnes seules. Si notre filiation remonte autant à Shekhinah Mountainwater
qu’à Gerald Gardner, nous préférons considérer que cette dernière compte moins que l’engagement
sincère des initiants et initiés.
Sorcellerie et spiritualité
Face à la récente
émergence de nombreux groupes féminins, d’initiation aux mystères de la Déesse
et destinés à conduire l’initiée à la prêtrise, nous avons peu à peu observé
qu’il s’installait certaines confusions au sujet de la Wicca dianique. La Wicca
dianique partage avec ces groupes une spiritualité de la Déesse, une
connaissance de Ses mystères et l’initiation conduit bel et bien à la prêtrise.
Cependant, il semble fondamental de rappeler que la Wicca dianique, comme son
nom l’indique, est d’abord et avant tout une tradition wiccane. Et qui dit
Wicca, dit sorcellerie. La tradition de la Sphinge se considère avant tout
comme une tradition sorcière, et elle n’appelle à elle que celles et ceux
désireux de cheminer sur la voie de la sorcellerie wiccane. Conformément à la
tradition wiccane remontant à Gardner, la tradition dianique offre une
initiation en tant que sorcier(e) et prêtre(sse). La prêtresse initiée n’est
pas appelée à se dédier à une divinité particulière, sauf si elle le souhaite bien
entendu, mais ceci sera une décision prise hors de la tradition de la Sphinge,
une orientation qui lui sera propre, à côté de la tradition de la Sphinge. Mais
avant tout, l’aspirant(e) à appartenir à la tradition de la Sphinge doit
vouloir être sorcier(e), pratiquer la sorcellerie, s’entrainer seule et/ou
participer aux cérémonies de groupe. Celles ou ceux désireux de suivre la voie
de la Déesse mais ne souhaitant pas pratiquer la sorcellerie se tourneront vers
d’autres voies que la Wicca dianique.
Les divinités de la tradition
Nous ne nous reposons sur
aucun panthéon en particulier, mais préférons considérer l’immensité des
richesses de la planète, et les nombreuses figures de la Déesse qui existent.
La tradition sphingienne ne se veut pas reconstructionniste, car nous savons
que ce qui est passé ne peut être ressuscité que dans son essence et que c’est
vers l’avant qu’il faut regarder. Les mythes et divinités que le passé nous a
légués sont vivants et continuent de se transformer, telle Amphitrite. Rien
n’est jamais statique et immuable dans le courant de ce qui vit. Les nombreuses
déesses sont considérées comme représentantes d’un aspect de la féminité,
capables de nous guider pour guérir nos blessures, développer chacun de nos
aspects personnels et être des aides tout au long de notre parcours. Il en va
de même pour les hommes, qui à travers elles, peuvent mieux connaître le
féminin, mais aussi explorer leur propre nature, dans leur relation à la
Déesse. Si la tradition n’a pas de panthéon spécifique, chaque membre est libre
(et même encouragé) à avoir des affinités personnelles avec certaines Déesses,
que ce soit à un moment particulier de leur vie ou de manière générale. Tout
comme la Déesse est triple et plus encore, il arrive fréquemment de se sentir
appelé vers une Déesse en particulier à une certaine étape de l’existence, puis
de ressentir le besoin de se tourner vers une autre Déesse. Nous savons
instinctivement quelle forme revêt la Déesse pour nous épauler.
Bien que dianiques et non
duothéistes, certaines divinités masculines proches de la Déesse et amis des
femmes sont honorées en certaines circonstances, tels que Dionysos ou Shiva.
Ces dieux au genre sexué ambigu, dieux à la fois virils et efféminés, honorés
depuis des temps très anciens autant par des femmes que par des hommes au sein
de cultes à mystères ou de courants mystiques, sont l’image du dieu en harmonie
avec son animus et son anima.
Discor-dianisme : créativité et liberté
L’inventivité, la
curiosité, l’humour et l’esprit-critique sont des qualités valorisées dans
notre tradition. En effet, la tradition de la Sphinge est d’esprit discordien.
Bien que nous soyons sérieux dans notre démarche, nous reconnaissons la
créativité débridée, l’humour parodique, et le désordre ou le «sens dessus
dessous» de manière générale comme des valeurs positives, proches dès le départ
de la créativité prônée par la tradition dianique. Nous considérons qu’il n’est
pas sain de ne pas savoir rire de soi-même et que se prendre trop au sérieux
est hautement nuisible autant à l’esprit que socialement. Nous n’adhérons pas à
une liturgie immuable, mais tel le Mat dans le tarot, ou telle Fortuna qui
avance sur une roue les yeux bandés tout en jonglant avec les bienfaits, nous
nous amusons bien ! Quant à l’esprit-critique, celui-ci est essentiel pour
toujours rester en phase avec soi-même et nous empêcher de suivre aveuglément
des directives qui ne nous correspondent pas réellement. Il nous permet de ne
pas accepter n’importe quoi sous prétexte que c’est professé par une tradition
ou une personne assimilée à un guide,
mais nous renvoie à nous-mêmes, à nos limites, mais aussi à notre inventivité
car nous restons toujours libres d’adapter à notre convenance selon notre
sensibilité personnelle. De même, toute initiative personnelle est grandement
appréciée et honorée. La tradition sphingienne tend ainsi au développement de
soi et du développement de son propre
pouvoir afin de créer autour de nous le monde auquel chacun aspire.
Se retrouver en
cercles de femmes, en cercles d’hommes, et partager ensemble
En tant que tradition
dianique, bien que mixte, le partage entre femmes au sein d’un cercle perdure,
et nous célébrons ainsi les mystères propres aux femmes. Les hommes sont
appelés également à échanger entre eux, et en se dédiant à la Déesse, ont leurs
propres rites de passage. Tous ensemble, nous partageons nos expériences
propres et cherchons la connaissance de l’autre afin que la compréhension qui
en découle permette réellement aux barrières qui séparent les genres de tomber.
Comparaison aux Mystères anciens et vie après la mort
Notre histoire, celle
d’une tradition dianique réservée aux femmes qui s’est ouverte peu à peu aux
hommes, fait de nous des héritières et des héritiers des anciens Mystères,
lorsque les Mystères dionysiaques, fondés sur l’initiation de la Mère Sémélé,
regroupant uniquement les femmes s’ouvrirent aux hommes par l’initiative de
Paculla Annia ; et lorsque les mystères de Cybèle ne furent plus uniquement
masculins. Nous connaissons les symboles et significations de ces mystères et
comme eux, nous voyons dans le parcours initiatique et la célébration de la
Déesse une voie vers l’extase, autant dans cette vie que dans l’après-vie, que
ce soit par la réincarnation ou dans le séjour bienheureux de la Déesse.
Un coven et un enseignement à distance : cercle intérieur et
cercle extérieur
Le Paradigme de la Sphinge
est d’abord un coven opératif, basé sur la région de Strasbourg bien que nos
lieux de pratique puissent couvrir tout le Bas-Rhin selon l’envie des membres,
les rituels, les préférences et disponibilités. Le coven se réunit une à deux
fois par mois pour des échanges, de l’enseignement, des exercices,
de l’entrainement
énergétique et magique, de l’écriture en commun de rituels ou des partages de
charmes… Les pleines lunes sont célébrées, parfois au besoin les lunes noires
ou nouvelles lunes. Des repas ou collations accompagnent chaque réunion et une
partie du temps est consacré aux indispensables et inévitables bavardages et
échanges de nouvelles. L’union, l’amitié, le soutien et la complicité sont des
valeurs essentielles du coven, ceci renforçant l’énergie du groupe, la cohésion
de chaque rituel et l’harmonie en elle-même.
L’appartenance au coven
est possible pour toute personne sérieuse, sincère dans sa démarche, en accord
avec les principes fondamentaux de la tradition de la Sphinge et prête à
s’investir à la fois personnellement et en commun au sein du groupe ; ceci
passe bien entendu par l’effort d’être présent à toutes les réunions et tous
les rituels, ou du moins de s’efforcer à garantir une réelle assiduité dans la
vie du coven. On n’insistera jamais assez sur le fait que l’appartenance à un
coven demande un grand engagement personnel, mais que ces efforts sont
rétribués au triple lorsqu’ils sont fournis.
Les personnes désireuses
de cheminer sur la tradition de la Sphinge mais vivant hors de l’Alsace peuvent
appartenir au cercle extérieur en suivant des enseignements à distance,
répartis en treize cycles lunaires et débouchant sur l’initiation, la même que
pour ceux qui auront cheminé au sein du coven.
Quelques pratiques du Paradigme de la Sphinge
L’entrainement en coven
(et enseigné à distance) comprend de nombreux exercices de méditation,
d’exercices énergétiques, de travail sur les éléments, sur les outils rituels,
sur les différents aspects de la Déesse et de Ses nombreux visages. Le rituel
est en soi un moment privilégié d’entrainement, en même temps que de
célébration. Il comprend la projection du cercle avec l’appel aux éléments, la
bénédiction du cercle et sa purification, ainsi que des gâteaux et de la
boisson. Le moment clé est la formation du cône de pouvoir, destiné à fournir
l’énergie pour envoyer des intentions sous forme de ce qui est communément
appelé des «sorts». Cependant, la formation du cône de pouvoir n’est pas
uniquement à but pratique, mais est un moment privilégié dans le coven car il
ouvre la porte à la transe et à des expériences extatiques. La danse, les
chants et psalmodies, la musique, constituent des portes aux états modifiés de
conscience, de rencontre avec la Déesse et au dépassement de soi-même, à
l’union avec le divin. Ainsi, l’élévation du cône de pouvoir est une expérience
intense, mystique en ce qu’elle puise dans les techniques extatiques des
mystères anciens tels que les mystères de Cybèle ou de Dionysos. La rituélie
disparait pour laisser la place à un ensauvagement sacré.
La sorcellerie étant
fortement basée sur la maîtrise des états de conscience modifiés, la transe est
expérimentée
sous d’autres formes que
lors de la formation du cône de pouvoir, par exemple par la «descente de la
Lune» sur la grande prêtresse lors de la pleine lune, ou lors de transes
induites dans le cadre de soins au corps, à l’esprit et à l’âme.
Ecrit Par
Hédéra
Quelques liens pour plus
d’informations sur la tradition de la Sphinge, sur l’enseignement à distance ou
pour avoir accès à des exemples de rituels de la tradition : http://paradigme-sphinge.voila.net/ et http://discor-dianique.over-blog.com/ - http://discoreloaded.canalblog.com/