Danser, c’est puiser au fond de nous, explorer et
utiliser notre énergie, notre Être tout entier. C’est un processus qui peut
ouvrir de nouveaux horizons sur le chemin spirituel, donner un relief
supplémentaire à des pratiques comme la méditation, la prière, la communion,
l’offrande…
La Danse
comme Prière, Méditation active
Danser, c’est laisser la place au corps. La
confiance, la libération, l’expression, nous avons vu cela dans la partie
précédente. Le Corps devient le vaisseau sublime de l’Âme, l’expression libre
du Cœur, mais l’esprit, le mental, n’est pas oublié. Un nouveau rapport
s’installe, quand l’esprit a donné toute latitude au corps pour le mouvement,
alors le corps peut lui revaloir ce bienfait car à travers le mouvement
corporel, c’est le mental qui s’apaise. Le singe du mental n’a plus besoin de
sauter de branche en branche, la conscience est dans le corps, dans le
mouvement, et l’agitation cesse comme un vent qui s’épuise. Le déplacement de
conscience (là maintenant, pensez à votre orteil droit, à ce que vous ressentez
dans votre orteil droit… Vous venez d’opérer un mini déplacement de
conscience…) est facilité par le mouvement, d’autant plus quand le mouvement
est libre de toute contrainte, que l’on danse seul(e) et que l’on se laisse
aller. Ainsi la danse peut mener à une méditation active, une transe reposante
dont la fonction d’exutoire peut être favorisée par rapport à l’esthétisme,
dans un contexte solitaire.
J’ai déjà entendu des païens partager autour du
concept de la prière, et la façon de prier est unique pour chaque personne.
Certains récitent des prières, lues ou écrites par eux, d’autres inventent une
prière orale à chaque fois, d’autres encore n’usent pas de mots mais simplement
de ressentis, d’émotions, le cœur se tourne vers le divin, les yeux brillent,
l’amour est échangé sans passer par les mots. Il y a autant de façons de prier
que de chemins spirituels. La danse peut être une prière. Elle facilite
l’apaisement du mental et procure le calme intérieur qui laisse toute la place
à l’échange sacré qu’est la prière. De plus, le mouvement permet au moins
autant d’expressivité que des mots. Pour peu que l’on danse sur une musique qui
nous transporte ou dont les paroles sont elles-mêmes une prière (comme des
chants de Libana ou Lisa Thiel), on peut alors laisser son corps transcrire les
mots de la chanson ou l’imager…
Communion
avec la Déesse
Danser en Tribal Fusion, ce n’est pas seulement
fusionner les genres, les traditions, les styles, les costumes, les mouvements,
c’est aussi, pour nous païennes, une fusion à d’autres niveaux. Une fusion de
la danseuse avec ce qui l’entoure, avec les Eléments, avec la Terre et le Ciel,
parfois aussi avec son Public quand il y en a un, avec l’Espace dans lequel
elle danse, et surtout, avec la Déesse, plus largement avec le Divin. Dans
l’Hindouisme
c’est la danse cosmique de Shiva et Shakti qui crée
le monde par les vibrations émises. La danse est l’acte de création
démiurgique.
Quand nous dansons, nous honorons notre corps, nous
apaisons notre mental, nous exprimons notre cœur et nous ouvrons notre âme :
Nous communions avec la Déesse, nous ressentons son immanence en toutes choses,
nous touchons Son Voile… La danse est une des voies de l’extase, de
l’expérience mystique, cet instant d’éternité ou la fusion devient fulgurante,
où l’individu touche au divin.
Le Corps comme Temple, la Danse comme Offrande Comme
nous l’avons vu en première partie, la danse constitue une aide précieuse pour
se reconnecter à son corps et à sa féminité. Poussons plus avant sur le chemin,
et la danse nous amène à ce concept, dont beaucoup ont entendu parler mais qui
n’est pas forcément bien compris ou intégré, de ressentir son propre corps
comme un temple. Il ne s’agit pas que de sa dimension sacrée, d’en prendre soin
comme vaisseau de l’âme, il s’agit de la fonction première d’un temple : faire
descendre le Divin sur Terre, créer un lieu d’habitation, de matérialisation du
divin, comme les statues divines dans les naos d’Egypte antique, qui étaient
conçues pour recevoir l’Essence de la divinité. Considérer son corps comme un
temple, c’est prendre conscience qu’y siège la Déesse, immanente et aimante,
infinie et éternelle, comme Elle siège au cœur de chaque cellule vivante, de
chaque particule de Nature. Ce sont de belles choses à dire, mais le ressentir
dans sa chair est autrement plus beau.
Starhawk dit un jour dans une de ses conférences
«Vous voulez voir un visage de la Déesse ? Alors tournez la tête et regardez la
personne qui est assise à côté de vous» (Starhawk, Femmes Magie et Politique).
Il est presque plus facile de voir la Déesse partout à l’extérieur de soi, la
ressentir en soi est plus délicat (faudrait pas non plus se gonfler les
chevilles quoi), mais nous avons alors accès à l’ensemble des sensations qui
découlent de cette prise de conscience. Considérer ainsi son corps pendant la
danse est une expérience formidable : nous dansons pour la Déesse, nous dansons
la Déesse.
Un aspect légèrement différent de cette relation
Corps-Divin est l’offrande. Tout comme il existe une infinité de façons de
prier, il existe une infinité d’offrandes. Offrandes d’aliments, de fleurs, de
chants, d’amour, de rituel de célébration, de symboles, de sang, d’ennemis
sacrifiés, de plaisir, de douleur, d’arts, l’être humain a donné une dimension
d’offrande à presque tout ce sur quoi il peut avoir une action. Offrir une
danse est un cadeau merveilleux. On offre tant de choses à travers une danse,
tant de parts de soi-même… On offre son corps, sa pudeur, sa préparation
physique, son effort, sa technique, son costume ou sa nudité, son travail, son
mouvement, son souffle, et un tas d’autres choses… On offre l’instant présent
avec intensité, on offre ce que la vie nous permet, on offre des choses si
belles que la beauté extérieure de la danse n’est pas forcément la plus
importante…
L’expérience de Sataset La Danse est pour moi plus
qu’un loisir, plus qu’une passion, c’est l’entièreté de ma vie qui brûle à
l’intérieur de mon être, qui motive tous mes actes. La danse s’est donc mêlée
très tôt à mon chemin spirituel, je prie en dansant, j’offre ma danse, je
l’utilise pour lever l’énergie… Je voudrais parler ici plus spécifiquement et
de façon plus personnelle de l’Offrande de Danse, moment magique entre tous,
instant d’intimité intense avec... Avec l’entité à laquelle on offre la danse,
Déesse, Divinité, Nature, Forêt, Terre, Esprits du lieu…
Lorsque je danse pour une offrande, tout participe
de l’offrande. La danse en elle-même est le principal ingrédient, je la veux
harmonieuse, passionnée, vibrante, amoureuse, en un mot belle ; mais j’offre
également mon corps en cet instant, j’offre tout ce que je suis, mon présent,
ma sueur, ma douleur, mon souffle, le Temps et l’Espace, j’offre cette parcelle
de Vie scintillante qui m’anime et me permet de danser. J’offre aussi mes
émotions, mes sentiments, tous ces ressentis qui sont décuplés par l’expression
corporelle, des choses qui peuvent paraître neuneus à écrire ou lire mais qui sont
pourtant vibrantes quand on les vit, comme la joie de vivre, l’amour pour la Déesse, la sensation de
communion avec la Nature (oui, même dans mon appart au 4ème étage d’un
centre-ville, oui !)… Ca ce sont les plus courantes, mais osez un jour offrir
votre colère, votre rage, ou même votre amertume, c’est un instant et un
procédé vraiment magique…
L’offrande de Danse reste pour moi d’une part la
plus belle façon de danser, et d’autre part la plus belle offrande… La Danse
comme levée du cône de Pouvoir, d’Energie, son utilisation en magie opérative.
De par la fusion décrite en deuxième partie, par la communion avec la Déesse,
la transe induite par la danse, la danseuse est dans une dynamique d’échange et
de communication sur l’instant avec ce qui l’entoure, et avec l’Essence du
Monde. L’utilisation consciente des formidables vecteurs que sont la musique et
la danse fait jaillir des fontaines d’énergie qui, maîtrisées, peuvent mener à
la formation d’un cône de pouvoir… La levée du cône de pouvoir est une expression
reclaiming dont j’aime beaucoup l’image car elle correspond parfaitement à ma
conception pratique et expérimentale de cette montée d’énergie qui est le
support de tout rituel opératif.
Danser
dans un cadre rituélique
La danse dans le cadre d’un rituel implique
justement de prendre en compte la notion de cadre. Il faut réfléchir aux
notions pratiques de la danse à l’intérieur d’un cercle : soit on se limite à
danser sur place sans grandes enjambées, soit on projette un cercle d’une
taille «cercle de groupe»… On peut également choisir d’opérer le rituel sans
cercle mais, au-delà de la protection ou de la délimitation de l’Espace sacré,
on perd la fonction contenante du cercle, sorte de bulle qui contient les
énergies exsudées durant le rituel. Il faut alors être capable de garder
concentrée l’énergie que l’on soulève par la Danse jusqu’à sa libération, ce
qui demande une certaine maîtrise de la manipulation énergétique. Tout dépend
donc de ce que la Danseuse souhaite privilégier, de ce dont elle se sent
capable, et aussi de l’objectif du rituel.
Si c’est un rituel de célébration, maintenir la
concentration énergétique n’est pas une priorité absolue, on peut par exemple
aller danser dans la forêt et offrir cette Danse, cette énergie, aux Esprits du
lieu ou à la Déesse. Si au contraire c’est un rituel opératif avec un objectif
précis, il faut pouvoir accumuler l’énergie jusqu’au moment culminant. On
libère alors tout ce qu’on a soulevé comme une décharge de courant, brutale et
totale, soit dans une visualisation de l’objectif atteint, soit dans un charme
à charger, soit dans un symbole, etc. Petit truc à savoir, si vous dansez dans
vos rituels et que vos mouvements, quand vous êtes lancée dans la musique
(voire en transe) sont rapides, parfois brutaux, et demandent beaucoup au
corps, n’oubliez pas de vous échauffer avant !
J’ai souvent payé de plusieurs jours de douleurs des
transes dansantes, surtout au niveau des cervicales et des genoux… Il n’est pas
toujours aisé ou même simplement agréable de garder une partie de conscience
pour faire attention à ne pas trop bouger telle ou telle partie du corps, alors
au moins pensez à vous échauffer !
La montée d’énergie – L’expérience de Sataset
Concrètement que se passe-t-il ? Il est difficile de décomposer et d’expliciter
ce qui se passe au niveau énergétique dans un rituel, plus encore ce qui se
produit pendant la transe, si transe il y a. Je vais essayer de décrire ce qui
peut se passer.
Cela est sûrement très personnel, et encore cela ne
se passe pas toujours ainsi pour moi… Ce n’est qu’un aperçu… On choisit une
sélection de musiques qui nous emportent, qui nous inspirent, on commence
doucement, on se laisse aller, on relâche toute tension, physique et psychique,
on se laisse capturer par la musique, les sons sont transcrits en mouvements,
les pieds s’ancrent à la Terre, les bras s’envolent vers le Ciel, la Danse
commence à s’intensifier…
La musique devient plus puissante, l’énergie
commence à scintiller au centre de notre être, dans le Chaudron, le chakra
sacré, les ondulations l’intensifient, les accents lui donnent de la puissance,
les shimmies rendent l’énergie vibrante, tout cela se masse autour de nous,
comme si l’aura s’intensifiait, comme une boule qui aurait le chakra sacré pour
centre. Le moment venu, on décharge cette énergie d’un seul coup. Quand ? Où ?
Comment ? Tant de réponses peuvent être données. Comment sait-on que le moment
est venu ? Dansez, essayez, et vous le saurez. Il est un moment où l’on sait
que le «niveau» d’énergie est suffisant, cela est valable pour toutes les
façons de lever un cône de pouvoir.
Vous pouvez aussi choisir d’arrêter dès que vous
avez mal quelque part ! Où ? Cela dépend de l’objectif du rituel : dans la
Terre, dans une visualisation, dans un symbole, un charme, dans la Nature
autour de nous… L’énergie peut former une boule autour du Chakra
solaire, elle peut rayonner sans forme autour de nous, la sphère autour du
chakra sacré n’est qu’un exemple. Tout ceci n’est à prendre que comme un
exemple, une expérience, et non un schéma de rituel. Soyez créatifs,
écoutez-vous, écoutez votre corps, et lancez-vous ! Vivez votre expérience !
Nous l’aurons compris, la danse reste un sujet somme
toute très personnel. On y exprime des choses propres à soi, à son vécu. Mais
une chose met tout le monde d’accord : la danse rassemble, célèbre,
raconte. Laissez-vous donc porter par la
musique, entrez dans la danse, et voyez les possibilités d’expression qui
s’offrent à vous !
Quoi de plus beau que de faire de son corps non pas
un temple aux stéréotypes actuels mais à sa spiritualité et à la grande Déesse
!