A l'origine, vos compétences étaient l'expression
d'énergies créatrices s'appliquant à la survie, la tradition, la beauté,
l'harmonie, la maternité, la connaissance et la sagesse, reflétant ainsi le
vécu féminin et l'influence réciproque existant entre vous et la vie.
C'est pourquoi votre faculté créatrice était respectée et
considérée comme essentielle à la survie du pays et reconnue comme le reflet du
divin. Vous apportiez la stabilité et fondiez la communauté, faisant du foyer
un havre de paix, de sécurité, de réconfort où on se sentait « bien ». En
particulier chez les nomades, c'était la femme qui bâtissait le logis,
fournissant ainsi un refuge à sa famille et à l'homme. Vous pourvoyiez
également à la nourriture en cultivant la terre, faisant pousser des plantes
nourricières et les cueillant à la bonne saison. Vous faisiez la cuisine,
préparant des aliments qui, restés à l'état brut, n'auraient pas été
comestibles, de même que des conserves afin de manger pendant la période
hivernale. Par votre connaissance des plantes, vous assuriez guérison et
bien-être.
Vous puisiez dans les ressources naturelles pour réaliser
les objets indispensables à la survie et au confort. Les peaux étaient
utilisées pour se loger, se vêtir et se parer. Plus tard, les toisons des
moutons et des chèvres domestiques furent filées pour donner de la laine et
tissées pour fabriquer des vêtements. La tradition voulait souvent que vous
réalisiez les poteries destinées à stocker les conserves, fassiez la cuisine,
portiez l'eau ainsi que les nattes et les paniers fabriqués de roseaux et de
branchages entrelacés. Les multiples tâches quotidiennes prenaient souvent un
caractère votif dans l'expression religieuse féminine et la décoration était
présente afin de refléter la beauté du monde environnant.
Ces compétences en décoration étaient sans importance au
regard de la survie et du bien-être matériel immédiats de la famille, mais
elles introduisaient la conscience de la beauté au sein de la communauté pour
devenir plus tard des caractéristiques importantes dans le commerce entre les
peuples. Vous avez aussi créé la famille, non seulement en mettant au monde des
enfants qui perpétueraient l'espèce, mais également par le concept
d'appartenance. Les relations, dont vous avez posé les fondations, sont
devenues source d'une organisation apportant aide, soutien et compassion en cas
de besoin. Votre aptitude à instaurer la continuation de la vie a introduit les
concepts d'ascendance.
Vous êtes également responsables de la transmission des
compétences et des traditions nécessaires à la survie des enfants, favorisant
chez eux la compréhension du rôle de l'humanité dans la nature, établissant
ainsi les futurs caractères et traditions de la communauté. Même avec
l'accroissement de la domination masculine, les aptitudes créatrices féminines
sont toujours recherchées, quoiqu'elles aient perdu beaucoup du respect et du
rang initiaux qui leur sont dus. Au fil du temps, vous êtes devenue le
producteur de biens et de divers services ainsi que de vêtements et de
nourriture, mais tout ce que vous produisez devient immédiatement propriété
masculine. Votre aptitude « magique » à créer se trouve éclipsée par le droit
de propriété masculin. L’expression active de vos énergies créatrices par le
biais de l'intellect ou de la spiritualité vous est fermée.
Vous conservez encore votre importance dans la
procréation d'enfants, notamment d'héritiers mâles, mais votre aptitude à
former leur personnalité et leur intellect a été récupéré par les hommes.
Jusqu'aux années 1960 dans la société occidentale, les femmes en tant que
créatrices du foyer et procréatrices des enfants avaient encore de la valeur,
mais, dans les domaines intellectuel, sexuel et spirituel, cela était limité et
souvent réduit à l'idée de « protéger le bonheur de leurs maris et de leurs
enfants ». Elles utilisaient toujours leurs compétences pour nourrir, vêtir,
façonner les objets, fonder une famille et un foyer, mais cette importance,
sauf en temps de guerre, était considérée comme très secondaire au regard du
travail et du rôle masculins.
Avec les années 1970 et la montée du féminisme, il
s'opère un changement notable. Vous commencez à exiger qu'on vous offre la
possibilité de mettre vos capacités en pratique dans des domaines autres que
domestiques. L'image de l'intellectuelle met à profit vos facultés créatrices
dans la communication, la réalisation de projets, la conceptualisation, la mise
en place de structures, d'où l'obligation d'être organisée. Cependant, pour
obtenir cette reconnaissance, vous avez dû entrer en compétition avec les
hommes sur leur propre terrain et l'issue de cette bataille est la
dégénérescence de l'ultime expression matriarcale de la maternité et de la
fondatrice du foyer. Le fait que vous envisagiez vos compétences féminines traditionnelles
dans le domaine créatif en termes masculins, fait que vous les considérez comme
moins importantes qu'une activité « convenable », voire même avilissantes.
Aussi, celles qui ne souhaitent pas renoncer à leur rôle traditionnel de mère
subissent une pression croissante des deux côtés puisque les femmes leur
reprochent de trahir leur cause et les hommes de ne pas participer à
l'acquisition de revenus financiers
A la faveur de la « liberté » revendiquée par le
féminisme, la société polarise le rôle des femmes, le faisant osciller entre la
« bonne » ou la « mauvaise » mère et entre la « bonne » ou la « mauvaise »
employée. L’image de la maternité comme source et force de la société est
tombée en désuétude et, au pire, les mères sont aujourd'hui considérées comme
une charge financière les soins prodigués en gynécologie/obstétrique et
l'accouchement pratiqué en milieu hospitalier diminuent la maîtrise que vous
exercez sur votre corps et risquent d'assimiler la mise au monde d'une enfant à
une chaîne de production rentable.
L'image qu'a la société de la mère n'est plus une image
de dynamisme, mais celle d'une femme molle, dépourvue de toute force d'âme
personnelle ou intellectuelle. Vous, qui abandonnez votre activité
professionnelle pour fonder une famille, avez souvent beaucoup de mal à
retrouver un travail rémunéré lorsque vous le souhaitez.
Bien que les sociétés
soient légalement tenues d'offrir des débouchés équivalents, il est dit qu'une
femme voulant quitter sa profession pour élever ses enfants est de l'argent
gâché. Par ailleurs, les autres représentations de vos compétences créatrices
traditionnelles ont perdu du terrain; là où autrefois elles étaient le moyen de
la survie, l'expression de l'expérience et de la compréhension de la vie,
maintenant leur importance est ramenée au niveau de passe-temps sans grande
valeur. Les énergies et capacités créatrices féminines peuvent proposer
beaucoup à la société et les femmes d'aujourd'hui commencent à se ménager la
possibilité de les exprimer à nouveau dans des domaines auxquels elles avaient
accès dans le passé, mais aussi dans d'autres jusqu'alors fermés au vécu
féminin.
Vous n'avez cependant pas de rôles bien définis et il en
est de même pour l'expression de vos énergies créatrices. L'emploi que vous en
faites dans la maternité, comme directrice de société ou comme femme éclairée,
toutes ces fonctions ont de la valeur et participent à la nature féminine. Pour
que l'ensemble de la société accueille le langage de vos énergies sous toutes
ses formes, qu'il s'agisse de celles de la Vierge, de la Mère, de
l'Enchanteresse ou de la Sorcière, vous devez d'abord reconnaître leurs
différents aspects, puis les laisser s'exprimer et les accueillir favorablement
chez d'autres femmes.
EXTRAIT
DE LA FEMME LUNAIRE de Miranda Gray -Editions Jouvence
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