Qu’est-ce
que cela signifie lorsque nous identifions une déité féminine comme étant une
Déesse Mère ? Est-ce que le terme Mère signifie une personne maternelle qui
protège les enfants? Est-ce qu’une Déesse Mère signifie aussi une Déesse des
naissances ? Est-elle une Déesse créatrice de l’univers ou une Déesse Terre
(nommée aussi Terre Mère) ? Est-ce qu’elle est alors une Déesse de la fertilité
ou une Déesse de la nature ?
Et que représente le terme fertilité ?
Déesse Mère pourrait signifier Déesse de la fertilité mais le
terme fertilité est en soi plutôt vague et a plusieurs connotations. Le mot
fertilité pourrait représenter la Terre en soi (fertilité de la terre) ou
encore la vie végétale et agricole. Il pourrait aussi signifier la fertilité de
la vie animale, comme celle des humains, et, conséquemment, la reproduction et
les relations amoureuses. Comme vous le constatez, le terme fertilité est trop
ambigu.
La Déesse Mère a d’ailleurs autant de rôles
que de définitions. Elle peut aussi jouer le rôle de Terre Mère (Déesse Terre)
et, parfois, les deux rôles sont confus et s’entremêlent comme dans le cas de
la Déesse grecque Gaïa qui était connue pour son rôle de Terre Mère et de
Déesse Mère. La Terre Mère est souvent perçue comme la force primale et la
source de toute vie. Elle ne possède pas nécessairement un côté maternel. La
Déesse Mère, elle, protège ses enfants et donne naissance aux divinités comme
dans le cas de Rhéa, mère des divinités olympiennes. La Déesse Mère peut aussi
être accompagnée par un consort de nature humaine ou divine, avec lequel elle
doit s’unir périodiquement comme dans le cas de Cybèle et de son consort Attis.
La Déesse Mère peut aussi avoir plusieurs attributs comme dans le cas de Déméter,
Déesse du blé, Déesse Mère et Déesse de la fertilité.
Jusqu’ici, nous avons mentionné des Déesses connues grâce à la
littérature et la mythologie. Nous n’avons pas mentionné les Déesses des
civilisations égéennes de l’âge de bronze. Toutefois, les seuls écrits existant
à propos de l’existence des divinités de l’âge de bronze sont les tablettes en
linéaire B2 trouvées à Knossos et Pylos. Il n’existe aucune littérature ni
aucune mythologie. Nous ne possédons aucune information à propos de leur
culture, leurs croyances et leur histoire. Nous ne possédons que les noms qui
apparaissent sur ces tablettes.
À Pylos, des tablettes dévoilent le nom de ME-TE-RE TE-I-JA, ou
Mater Theia signifiant Déesse Mère. Qui était-elle? Nous ne pouvons que deviner
et supposer…
Étant donné que les tablettes en linéaire B fournissent très peu
d’informations pour déceler les divinités durant l’âge de bronze, les artefacts
ont été d’une aide précieuse. Toutefois, les figures représentées sur les
artefacts ne sont nullement identifiées et nous devons faire confiance aux
experts qui tentent d’interpréter. Il est donc difficile de déterminer si les
figures féminines représentent une Déesse, une prêtresse ou une chef de clan.
Ce que nous savons avec de plus en plus de certitude, c’est que
les divinités féminines étaient plus adorées que les divinités masculines. Aussi,
il est de plus en plus certain que ces Déesses étaient généralement des Déesses
Mère.
Certains experts croient que les civilisations minoennes et
mycéniennes ne vouaient pas un culte à plusieurs Déesses, mais à une seule
Déesse puissante, comme les Israélites qui adoraient un seul Dieu. Jusqu’au
moment où nous décrypterons les textes en linéaire A, faits par les Crétois,
nous ne saurons jamais avec certitude si les Minoens adoraient seulement des
Déesses ou si des divinités masculines existaient.
L’arrivée
des tribus helléniques apporta aussi le panthéon olympien dans lequel les
divinités masculines dominaient, dont Zeus le Dieu suprême. Nous ne pouvons
que spéculer sur le nombre de Déesses pré-helléniques qui ont survécu à la
transition de l’âge de bronze à l’âge de fer. Nous avons ensuite assisté à la suppression du culte des Déesses
ou à la réduction de leur importance et de leur rôle.
La
Maîtresse (Potnia)
PO-TI-NI-JA ou Potnia ressemble plus à un titre ou un rang qu’à un
nom. Potnia signifie Maîtresse ou Dame. Potnia était une Déesse Mère ou Déesse
de la nature. Il y a plusieurs épithètes au nom Potnia qui veut soit dire
qu’une même Déesse avait plusieurs attributs ou visages, ou encore qu’il
existait plusieurs Déesses. Étant donné le manque de sources fiables, le peu
que nous savons sur les différentes Potnias sont pures spéculations.
Maîtresse des Animaux (Potnia Theron)
Potnia Theron ou Maîtresse des Animaux est la Potnia la plus
communément représentée dans l’art minoen et mycénien. Elle était aussi connue
sous le nom de Dame des créatures sauvages, Maîtresse des bêtes sauvages et
plusieurs autres appellations.
Toutefois,
il est important de noter que le nom Potnia Theron n’a pas été retrouvé sur les
tablettes en linéaire B. Ce nom est en
fait une appellation moderne pour désigner les Déesses phoégéennes de l’âge de
bronze représentées avec des animaux. Ce serait donc une erreur que d’affirmer
qu’une Déesse en particulier portait ce nom. Potnia Theron est une Déesse de la
nature, plus particulièrement une Déesse sauvage des animaux. Elle dirige tout
ce qui est de l’ordre de la nature et des animaux.
Influences
du Proche-Orient
Potnia Theron est associée à la Crète ou à la Grèce mais aussi à
la Syrie et à Babylone. Durant l’âge de bronze, les liens commerciaux entre la
civilisation minoenne et celle du Proche-Orient étaient si forts que l’on
considère l’influence religieuse du Proche-Orient très importante. Dans l’art
oriental, la Maîtresse des animaux est souvent représentée nue avec des animaux
de chaque côté. Parfois, elle les tient dans ses mains par leurs oreilles, leur
cou ou leurs pattes. Aussi, elle était parfois représentée se tenant derrière un
animal démontrant son pouvoir auprès de la nature et de ses créatures sauvages.
Ces influences sont bien illustrées grâce à un vase datant du 4ème
siècle avant J.C. représentant la Déesse Artémis tenant un lion et un cerf par
la gorge. Cependant, Artémis porte une longue robe, contrairement à son
équivalent oriental.
Artémis est la Déesse la plus associée à Potnia Theron. Elle est
la Déesse de la chasse, de la forêt et la protectrice des animaux sauvages.
Potnia Theron peut aussi être associée à la Déesse chasseresse crétoise
Britomartis ou Dyctinna. D’ailleurs, Britomartis est considérée comme l’ancêtre
d’Artémis. Inutile d’expliquer plus longuement les liens infinis entre toutes
ces Déesses.
Différences
entre Potnia Theron et Artémis
Nous l’avons vu, Artémis est la Déesse grecque la plus proche de
Potnia Theron, à cause de son engagement auprès des animaux sauvages.
Toutefois, voici les différences pertinentes entre ces deux Déesses.
Artémis est habituellement représentée comme une vierge tenant un
arc, symbole de chasseresse. Potnia Theron n’a jamais été représentée avec un
arc. Elle était une Déesse de la nature mais pas une chasseresse. Son pouvoir
est représenté par le fait qu’elle tient les animaux avec force par leurs
oreilles, leur gorge ou leurs pattes. De plus, Potnia Theron est représentée
avec des ailes, ce qu’on n’a jamais vu dans les représentations d’Artémis.
Aussi, Artémis était souvent accompagnée de nymphes ou de femmes inconnues
tandis que Potnia Theron était plutôt accompagnée de figures masculines,
habituellement des mortels comme des grands chefs ou des grands guerriers
(comme dans les représentations des Déesses du Proche-Orient). Ceci s’explique
surtout par le fait que Potnia Theron était aussi la patronne des jeunes
guerriers ce qui est plutôt intéressant car Artémis était parfois considérée
comme la patronne de l’initiation des garçons devenant de jeunes guerriers à
Sparte.
En 1903,
l’archéologue Sir Arthur Evans découvrit deux figurines de femmes dans un
temple dans le palais de Knossos en Crète. Les figurines n’étaient pas
complètes et donc, ont été reconstituées. Ces figurines
ont été nommées « Déesses Serpent ».
Les Déesses Serpent ont été créées pendant la période minoenne,
autour de 1700 avant J.C., au moment où la Crète avait atteint un niveau
artistique très élevé. Il y a eu beaucoup de spéculations à propos de ces
figurines, surtout pour savoir quelle Déesse était représentée par celles-ci.
Certains ont dit qu’elles représentaient simplement une charmeuse de serpents
et d’autres, une prêtresse. Toutefois, la plupart croient que ces figurines
représentent une Déesse tout simplement nommée Déesse Serpent mais aucune
preuve ne confirme cette théorie.
La première figurine représente une femme portant une robe peu
commune et sa poitrine est exposée. Sur sa tête, elle porte un chapeau et sur
celui-ci, un chat est assis. Elle tient aussi deux petits serpents dans chacune
des mains nous rappelant Potnia Theron, Maîtresse des Animaux tenant un animal
dans chaque main. Les deux animaux qui l’accompagnent donnent quelques indices
sur la nature divine de la Déesse Serpent. Le serpent, comme le chat, est un
symbole de la vie après la mort, ce qui pourrait signifier qu’elle est une
Déesse chthonienne. Le serpent est aussi symbole de guérison, donnant à la
Déesse le pouvoir de guérir. Aussi, le chat pourrait représenter l’aspect
sexuel et fertile de cette Déesse. D’ailleurs, ses seins ronds exposés
appuient cet aspect important. Tout ceci pourrait indiquer que la Déesse
Serpent est une Déesse Mère.
La seconde figurine est plus grande, elle porte une robe
différente mais, comme la première, sa poitrine est aussi exposée. De plus,
elle porte un haut chapeau. Elle tient un long serpent dont la tête est tenue
dans la main droite. Le corps du serpent s’enroule autour du corps de la
figurine et sa queue se trouve dans sa main gauche. Le second serpent est placé
sur le sommet du chapeau et s’enroule aussi autour du corps.
Les deux statuettes représentent le fait qu’il existait une seule
Déesse représentée de deux manières ou encore le fait qu’il y avait deux
Déesses Serpent.
Est-ce que la Déesse Serpent a survécu à l’invasion dorienne ?
Plusieurs se demandent si une des Déesses de la mythologie grecque a hérité du
rôle de la Déesse Serpent minoenne. Peut-être Artémis, Cybèle, Perséphone ou
Déméter ?
Britomartis
(Dictynna)
Britomartis est une Déesse crétoise de la nature et de la chasse.
Son nom signifie « Douce Vierge ». Elle est la fille de Zeus et Carme, fille
d’Eubulus. Elle est née à Caeno en Crète. Elle était considérée comme une
nymphe crétoise. Britomartis était une chasseresse et était considérée comme la
compagne d’Artémis. Il y eût même une théorie selon laquelle elle fût son
amante. Comme Artémis, sa chasteté était très importante. Un jour, Minos, roi
de Crète, tomba amoureux d’elle mais Britomartis refusa son amour, considérant
que celui-ci était son demi-frère. Minos se mit à la poursuivre et la piégea
sur le bord d’une falaise. Elle décida de se jeter à la mer, préférant mourir.
Elle fût heureusement sauvée grâce aux filets d’un pêcheur. À cause de son
ardeur et son désir de demeurer chaste, Artémis la récompensa en lui donnant
l’immortalité.
Elle fut alors nommée Dyctinna, signifiant Dame des filets,
désormais Déesse. Il semblerait que ce nom lui fût désigné plus tôt car
Britomartis a inventé le filet de pêche. D’autres croient qu’elle fut nommée
Dyctinna en l’honneur du Mont Dicte où elle chassait avec Artémis. Dyctinna
serait aussi possiblement la Mère Montagne minoenne qui avait ses sanctuaires
sur le sommet d’une montagne. Britomartis est probablement identique à ou
dérivée de la Déesse de l’âge de bronze Potnia Theron. Dyctinna était aussi
nommée PI-PI-TU-NA, un nom trouvé sur les tablettes Linéaire B de Knossos. Si
cette théorie est vraie, alors Dyctinna est une Déesse minoenne archaïque et
plusieurs liens peuvent encore être faits.
Britomartis possède plusieurs attributs d’Artémis. Britomartis
devint Déesse de la chasse, de la terre, de la nature et des animaux sauvages.
Elle fût la patronne des chasseurs, des marins et des pêcheurs. D’ailleurs,
Artémis a déjà porté le nom d’Artémis Dyktinna dans ses sanctuaires dans la
baie de Chania et à Chersonesos. Donc, plusieurs présument que Dyctinna et
Artémis sont la même.
Le culte
de Britomartis avait lieu en Crète mais aussi sur l’île d’Égine, en tant
qu’Aphaea, Déesse locale. Sur l’île de Cephallonia, elle
était connue sous le nom de Laphria.
Gaea et
ses filles
Dans la mythologie grecque, Gaea et ses filles (Rhéa, Thémis et
Dione) sont les Déesses Terre et Déesses Mère les plus anciennes. Elles ont
joué un rôle essentiel dans la Théogonie d’Hésiode (3).
Gaea était considérée comme la Terre en soi. Son nom était parfois
Ge ou Gaia et les Romains la nommaient Tellus ou Terra. Non seulement elle
était la Déesse Mère ultime mais elle était aussi une Déesse créatrice. Gaea a
été engendrée par Éros (amour) et par Tartare venant de Chaos (abysse primale).
Ils étaient les premières matières physiques nées.
Du ventre de Gaea, sont nés plusieurs enfants gigantesques. Soit
sans partenaire masculin ou soit avec Éther, Gaea est devenue la mère d’Uranus
(ciel), de Pontus (Mer) et d’Ourea (montagnes). Uranus épousa sa mère et devint
le chef suprême de l’univers. Gaea et son époux/fils représentent la séparation
du ciel et de la terre. Elle mit au monde beaucoup d’enfants avec Uranus : les
Cyclopes, les Titans et les Géants. Aussi, avec son frère Tartare, elle mit au
monde un des plus grands monstres : le Typhon.
Gaea
créatrice de la Terre
Uranus
décida de cacher ses enfants et provoqua beaucoup de colère et de peine chez
Gaea. Elle demanda l’aide de son fils Cronos, le plus jeune et le plus brave
des Titans. Elle lui donna même l’arme, une faucille, pour tuer Uranus. Cronos
gagna du pouvoir pour régner sur l’univers mais il la mit en colère lorsqu’il
refusa de libérer ses propres frères. Gaea avait un talent pour la divination
(qu’elle passa plus tard à sa fille Thémis) et elle est connue pour être la première
à avoir possédé les oracles de Delphes. Alors, elle prédit à son fils que
celui-ci chuterait à cause de son fils. Ayant peur de perdre son pouvoir de
régner, il avala chacun de ses enfants que
Rhéa, son épouse, mit au monde. Gaea et Rhéa aidèrent alors Zeus, le plus jeune
des fils de Cronos, à prendre la place de son père et de celle des autres
Titans.
Gaea porta plusieurs autres enfants. Elle
demeure une des plus grandes Terre Mères ayant existé.
Rhéa
Rhéa, ou Ops ou Magna Mater, est une autre grande Déesse Mère.
Elle est fortement identifiée à la Déesse Mère phrygienne Cybèle (voir plus
bas sur Cybèle). Rhéa fait partie des Titans, enfants de Gaea et d’Uranus. Elle
est la soeur de Cronos, et lorsque celui-ci devient le chef suprême, elle
l’épouse. Toutefois, leur mariage n’est pas une union très heureuse.
Lorsque Gaea annonce que Cronos sera écrasé
par l’un de ses enfants, Rhéa voit cinq de ses enfants se faire avaler par leur
propre père. Une grande peine pour Rhéa. Ayant peur de perdre tous ses enfants,
Rhéa cache son plus jeune fils, Zeus, dans la grotte d’une montagne en Crète.
Elle pousse le courage en faisant passer une roche enveloppée dans du linge
pour Zeus que Cronos avale. Avec l’aide de sa mère Rhéa et de sa grand-mère
Gaea, Zeus réussit à faire cracher Cronos pour redonner les enfants avalés.
Zeus et ses frères défient alors Cronos.
Rhéa
est aussi responsable de la réconciliation entre Zeus et Déméter, donnant la possibilité
à Perséphone de passer les deux tiers de l’ année auprès de sa mère et un tiers
de l’ année auprès de son époux, Hadès.
Déméter
et Perséphone
Perséphone
est la fille de Zeus et Déméter et la Déesse du printemps, du blé mais aussi la
reine des souterrains. Elle jouait avec ses amies les Océanides ramassant des
fleurs dans la nature. Hadès, le frère de Zeus et Déméter, le seigneur des
souterrains, quittait rarement son royaume. Par contre, lors de cette journée,
il tomba amoureux de Perséphone. Il reçut la permission de Zeus d’apporter
Perséphone dans son royaume pour en faire sa reine. Déméter ne fut pas mise au
courant. Personne n’entendit le cri de détresse lorsque Hadès emporta de force
Perséphone, sauf Hékate et Hélios.
C’est
la nymphe Cyane, qui a vu la scène de loin, qui raconta tout à Déméter.
Déméter, pleine de colère et de tristesse, se mit à la recherche de sa fille
pendant neuf jours, sans succès. Au dixième jour, Hékate prit en pitié Déméter
et lui raconta qu’elle avait entendu Perséphone crier. Elle lui dit aussi
d’aller voir Hélios qui voit tout durant le jour. Ensemble, les deux Déesses se
rendirent chez Hélios, le Dieu Soleil. Hélios raconta tout à Déméter, dont
l’intention d’Hadès d’épouser Perséphone. Déméter fut encore plus colérique à
l’annonce de cette nouvelle. Tellement, qu’elle refusa de retourner à l’Olympe
et qu’elle décida de partir à la recherche de sa fille. Elle vagabonda,
empruntant une forme humaine et déformant sa beauté, visitant des villages.
Poséidon se mit à désirer le retour de Déméter et se mit à la poursuivre.
Déméter tenta de se cacher et de se dissimuler. Pour cette raison, elle se
transforma en jument. Toutefois, Poséidon la trouva et il se transforma à son
tour en étalon. Il la prit et celle-ci tomba enceinte. À ce moment, Déméter se
fit nommer Déméter Érynie ou Déméter Noire. En bas, sur la terre des humains,
on se mit à subir la famine due à la colère de Déméter, Déesse du blé, qui
avait le pouvoir de gérer l’agriculture. Elle mit au monde une fille nommée
Desponia, la Déesse des chevaux.
Déméter
à Éleusis
Toujours
à la recherche de sa fille, Déméter se rendit à la ferme de Céléus, Seigneur de
la ville d’Éleusis. La Déesse fit la connaissance des quatre filles de Céléus
mais elle se présenta sous le nom de Doso en tant que servante cherchant du
travail. Céléus et son épouse Metaneira l’accueillirent sous leur toit.
Déméter se mit à prendre soin du jeune enfant en lui offrant un charme de
protection et en confectionnant des onguents. Un soir, Meteneira interrompit un
rite de guérison que Déméter éxécutait, par peur que la Déesse brûle l’enfant.
Déméter, prise de colère, révéla sa vraie identité. Elle dit à Céléus et
Meteneira qu’elle leur enseignerait, à leur famille et aux gens d’Éleusis, les
rites pour l’honorer elle et sa fille Perséphone, connus sous le nom des
Mystères d’Éleusis. Céléus et les habitants d’Éleusis débutèrent immédiatement
la construction du temple pour honorer les deux Déesses. Déméter fut donc
apaisée.
Le
compromis
Déméter
souffrait toujours de l’absence de sa fille et ne retournait pas à l’Olympe. Sa
colère face à ses frères, Hadès et Zeus, était si intense qu’elle causa une
famine globale. Aucune récolte n’avait lieu. La race humaine faisait face à
l’extinction due à la faim… C’est à ce moment que Zeus intervint. Il tenta par
plusieurs moyens de faire revenir sa soeur à l’Olympe mais celle-ci continua de
menacer les déités et de promettre que le monde mourra de faim si sa fille ne
lui revenait pas. Découragé, Zeus envoya Hermès quérir Perséphone dans les
souterrains pour que celle-ci retourne auprès de sa mère. Hadès ne s’y opposa
pas. Perséphone, joyeuse de retourner auprès de sa mère, mangea une grenade,
au grand désespoir de Déméter. Hadès lui rappela la règle qui affirme que
manger de la nourriture des souterrains force la personne à y rester…
Zeus décida donc que Perséphone devrait faire un
compromis : passer un tiers de l’année dans les souterrains avec son nouveau
mari et les deux autres tiers auprès de sa mère dans l’Olympe ou sur la Terre.
Zeus fit part de ce compromis à sa propre mère, Rhéa, qui elle, en fit part à
Déméter. Celle-ci accepta le compromis et rétablit l’ordre dans la nature et
l’agriculture, mettant un terme à la famine.
Ce
mythe est donc le symbole du cycle de la nature, des saisons et de la roue de
l’année.
Mère et
fille, vie et mort
De
tous les mythes gréco-romains, aucun ne peint une image aussi sensible et
humaine de la relation mère/fille comme le fait le mythe de Déméter et Perséphone.
Les Déesses, particulièrement Déméter, réagissent de manière tout à fait
humaine face à la perte d’un être aimé. Déméter réagit exactement comme une
mère humaine qui perd son enfant. Elle vit la perte, la douleur, le désespoir
et la colère ultime comme n’importe quelle mère humaine.
Leurs
noms, Déméter et Koré (Perséphone) signifient « mère » et « fille ». Déméter
était connue comme la mère du blé tandis que sa fille était l’esprit ou
l’essence du blé. Même s’il existe plusieurs versions du mythe, la moitié des
informations liées à ce mythe nous provient de l’Hymne Homérique à Déméter qui
détaille l’enlèvement de Perséphone. Il existe plusieurs niveaux
d’interprétation à ce mythe lié aux Mystères d’Éleusis et plusieurs auteurs
ont écrit sur le sujet. Les Mystères expliquent entre autres le cycle de la
vie, de la mort et de la renaissance. Même si cet article ne fait pas l’analyse
de ce mythe, il y a beaucoup à apprendre de celui-ci…
Au
départ, Perséphone incarnait la vie en soi. Sa vie sur terre était symbole de
printemps, de renouveau et sa vie dans les souterrains était symbole de la mort
et de l’hiver. Ironiquement le symbole de la graine a une double signification
la graine qui pousse au printemps est un symbole de renaissance mais la graine
de la grenade est un symbole de mort. Il existe plusieurs versions sur comment
Perséphone mangea ces graines de grenade : certains croient que Hadès la força
à les manger et d’autres disent qu’elle les mangea volontairement. Ce qui peut
signifier que la mort et la vie ne sont qu’un.
Étant
donné que nous ne connaissons pas les secrets des Mystères d’Éleusis (nous en
savons très peu), nous ne pouvons que spéculer sur la signification des rites.
Une chose est claire : de plus en plus on croit que le savoir et la sagesse
légués par ces mystères concernaient un espoir donné aux humains. Et que cet
espoir est qu’il existe une vie après la mort.
Les
Mystères se tenant à Éleusis se déroulaient en l’honneur de Déméter et de
Perséphone, ou Koré, comme on la nommait parfois. En gros, une partie des
cérémonies, des rites et des festivals était basée sur le changement des saisons
et sur l’agriculture. Des festivals spéciaux avaient lieu spécifiquement pour
les récoltes. En l’honneur des deux Déesses, les participants faisaient
revivre le mythe sur une scène de théâtre.
Artémis
d’ Éphèse
À
Éphèse, en Asie Mineure, il y avait un temple immense construit en l’honneur de
la Déesse Artémis (Diane). Ce temple, connu sous le nom d’ Artémésium, était
une des Sept Merveilles du Monde. Ce temple était immense et orné des plus
beaux objets d’art. Il était le plus grand des temples de l’époque, bâti par
Croesus, roi de Lydie, autour du 6ème siècle avant J.C. Détruit en 356 avant
J.C. par un fou nommé Hérostratus, il fut reconstruit par Alexandre le Grand
et redétruit par les Goths en l’an 262 de notre ère. Il n’a jamais été
reconstruit après la seconde destruction.
Chez
les Grecs, Artémis était vue comme une vierge chasseresse, tandis que sur le
territoire de l’Anatolie, elle était vue comme Déesse Mère. La sculpture
d’Artémis trouvée en Anatolie confirme cet aspect : la Déesse est représentée
avec plusieurs seins, un symbole de maternité et de fertilité. Elle est d’ailleurs
associée à Cybèle et certains se demandent si ce n’est pas plutôt cette Déesse
qui est représentée.
L’Artémis des Grecs
est une Déesse de paradoxes et de contradictions. Elle est une vierge mais
elle protège les enfants et est considérée, entre autres, comme la Déesse des
nais sances. Cet aspect est tout à fait en
contradiction avec l’Artémis éphésienne qui n’a rien de chaste et qui est loin
d’être une vierge.
Au sein des Amazones, elle reçoit le plus grand des honneurs :
elle est honorée comme la Déesse officielle des tribus d’Amazones et comme la
protectrice des femmes. Toutefois, ses attributs guerriers et sauvages sont en
contradiction avec la Déesse Mère d’Éphèse et la Déesse des naissances des
Grecs. Toutefois, l’Artémis d’Éphèse était aussi une Déesse de la nature et des
animaux sauvages, ressemblant étrangement à Potnia Theron, la Maîtresse des
Animaux.
Cybèle
Déesse Mère dans toute son essence. Cybèle (Kybele) est une Déesse
Mère phrygienne qui était honorée en Grèce et en Italie. Elle a été souvent
associée aux deux autres Déesses Mère grecques : Rhéa et Déméter. Cybèle fut
si grande qu’elle fut nommée « La Mère de tout » ou « La Grande Mère des Dieux
».
Cybèle portait aussi le nom de Dindymème ou Mère Dinymenienne car
elle est née sur le Mont Dyndimus. Zeus éjacula sur la Terre autour du Mont Dindymus
et une créature jaillit de la terre, possédant les organes reproducteurs mâle
et femelle. Les déités, ayant peur de cette créature, la castrèrent et elle
devint une femme. Cette créature devint la Déesse Mère Cybèle, nommée Agdistis
à Pessinus. Les déités jetèrent le phallus coupé de Cybèle et un amandier
poussa instantanément au même endroit. Un jour, Nana, fille du Dieu de la
rivière Sangarius, jouait sous l’amandier et une graine tomba sur sa cuisse. La
graine disparût et Nana fut enceinte. Elle mit au monde un fils nommé Attis
qu’elle abandonna dans la nature. Attis survécut grâce à une chèvre qui
l’allaita. Attis grandit et devint un très bel homme. Cybèle le vit et tomba
amoureuse de lui. Toutefois, il était promis à la fille du roi de Pessinus.
Cybèle fut prise d’une colère immense et causa la mort d’Attis et de son père
qui furent forcés de se castrer mutuellement. Cybèle, regrettant son action
face à Attis, enterra son corps près d’un pin.
D’autres versions racontent qu’Attis fut tué lors d’un combat avec
une bête sauvage.
Le culte de Cybèle a voyagé jusqu’en Italie, en 204 avant J.C. grâce
à la grande pierre d’obsidienne sacrée à Cybèle que l’on apporta à Rome, suite
à la demande de l’oracle de Sibylle de Cumes. Les Romains honoraient Attis
comme le Dieu de la végétation et de la fertilité et il était considéré comme
le consort de Cybèle. Le festival de Cybèle se déroulait le 4 avril et son
animal préféré est le lion. D’après la légende, il semblerait qu’elle aimait
que ce soit des lions qui tirent son chariot doré. Les adeptes du culte de
Cybèle et d’Attis se nommaient corybantes et ses prêtres se nommaient gallis.
Les gallis dansaient en transe jusqu’ à la castration en l’honneur d’Attis.
-
2 NDLR :
le linéaire B est une écriture mycénienne utilisée entre 1500 et 1200 avant
notre ère.
-
3 NDLR :
récit grec de l’origine des Dieux datant du VIIIème siècle avant notre ère.
Retrouvez cet article ainsi que d’autres
articles sur diverses Déesses sur le site Amna Dea : http://deesse.feminin-sacre.org/ ,
associé
au Temple de Dea :
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