La spiritualité a-t-elle un sens différent
dans la vie d’une femme que dans la vie d’un homme?
Existe-t-il quelque chose qui permette de
parler de spiritualité féminine? Sr Dr. Ágota Baternay, RSCJ, donne des cours de formation à des adultes
et les accompagne dans le cadre d’exercices spirituels. La fondatrice et présidente
de l’Association des Femmes Chrétien Chrétiennes en Hongrie, trace quelques
caractéristiques qu’elle a pu relever dans la vie spirituelle des femmes. (Original:
allemand)
Ecrire sur la spiritualité féminine est
une entreprise difficile. Comment expliquer quelque chose qui ne peut s’expliquer
qu’en le vivant? Aussi, avant de commencer, j’invite les lectrices à faire une
petite halte, à trouver un moment de calme et à s’écouter elles-mêmes.
Puis-je
entendre quelque chose à l’intérieur?
Qu’y
a-t-il
en
moi-même?
Que se
passe-t-il en moi?
Que me
fait le silence?
Combien de
temps puis-je tenir dans ce silence?
Quelles
sortes de voix commencent à parler en
moi?
Quel genre
de bruit m’entoure?
Quelle
agitation me saisit?
Quelle
sorte de joie, de peine ou d’ennui me
submerge?
Et si vous ne vous êtes pas dépêchées de
sauter ces quelques lignes, mais que vous avez pris un temps d’écoute en
vous, alors peut-être aurez-vous appris quelque chose de nouveau sur la
spiritualité. Car cette petite méditation n’avait rien d’une vanité de soi mais
c’était une prière, une présence sans mots devant Lui qui est déjà là en moi. Beaucoup
de choses ont été écrites récemment sur la spiritualité, peut-être à cause
d’une demande de plus en plus forte. Mais bien que tout le monde utilise cette
ex expression, personne ne sait vraiment ce qu’elle signifie. Des thèmes ou
sujets spécifiques en feraient-ils partie?
Des questions théologiques, des textes
bibliques, des poèmes religieux? Ou bien la spiritualité est-elle un moyen
d’aborder ces contenus? Par l’intuition, la médita méditation, la créativité?
Il existe bien sûr des définitions de la
spiritualité telles que: “une identité religieuse vécue” ou bien: “ce qui reste
de tout le savoir rassemblé par les humains au cours de leur socialisation
religieuse, et qui a progressivement une
influence déterminante sur la vie de chacun de nous”. (Fritz
Oser)
Depuis des siècles, la spiritualité a
été assimilée à la piété. Les confesseurs et les directeurs spirituels ont défini
les normes et conduit à des exercices à la vertu, souvent en y mettant des
accents négatifs. Ils avaient déterminé à l’avance à quoi devait ressembler une
femme pieuse.
Quelques
caractéristiques
Mais existe-t-il une spiritualité
féminine après tout? Si c’est le cas, quelles sont ses caractéristiques?
La spiritualité féminine connaît
différentes voies d’approches autres que simplement la pensée rationnelle. Le
langage des images et des symboles n’a pas besoin d’explications laborieuses
pour être compris. Si nous nous ouvrons simplement à ces symboles, ils peuvent déployer
tout leur pouvoir de changement.
La spiritualité féminine connaît
d’autres formes d’expression que des définitions qui séparent, en particulier le langage poétique. L’expérience
spirituelle des femmes est intimement tissée dans l’histoire de leurs vies, déterminée par les
différentes phases de la vie. Aussi, la meilleure façon d’expliquer la
spiritualité féminine est-il en racontant des histoires.
La spiritualité féminine concerne les
femmes en tant qu’entité. Elle inclut l’expérience de nos corps et adhère à
l’enseignement de Thérèse d’Avila quand elle dit: “Fais du
bien à ton corps, pour que ton âme aime y demeurer”. Elle comprend l’esprit
et l’âme et pénètre les sources profondes de la motivation, des convictions et
des attitudes fondamentales, de l’agir et des décisions. La spiritualité
féminine est intuitive, basée sur la compréhension par l’esprit, elle comprend
et reconnaît à partir de l’intérieur, elle ne dépend pas “d’instructions”.
La spiritualité féminine est complexe
(pas compliquée!), elle forme un réseau des différentes sphères de la vie et
d’expériences quotidiennes, elle crée des relations et unit.
La vie dans sa
plénitude
“Que sert à l’homme de gagner l’univers
s’il perd son âme”. (Luc 9-25) Cette parole de Jésus ne signifie pas que nous
ne pouvons pas gagner l’univers, mais que nous ne devons pas faire du mal à
notre âme sur sa route à travers la vie. C’est toute la question de la
spiritualité: “la vie dans sa plénitude” (Jean 10:10) où par une attention intérieure
“la nouvelle femme grandira sous la vieille peau” (Bruners).
Mais l’attention du coeur ne surgit pas
toute seule. “Ce n’est pas avant un retour à la pratique de la prière, de la
méditation et du silence, que ceux qui cherchent à apprendre pourront avancer
en spiritualité, et que la réflexion et les interrogations conduiront à
l’expérience”. (Waldenfels)
C’est peut-être “en vogue” de parler et
de lire sur la spiritualité féminine. Mais malheureusement il y a encore trop
peu de tentatives de la vivre ensemble. La théologie féministe rencontre et
doit surmonter des rejets et des obstacles, et la spiritualité féminine devra faire
face aux mêmes difficultés pour pouvoir s’affirmer haut et fort. Son existence
même, souvent, n’est pas reconnue, pas prise au sérieux, pas acceptée. De ce
fait, il est considéré en général –par les femmes aussi – comme une présomption
incongrue que des femmes, même quand il s’agit de religieuses, donnent des
exercices ou accompagnent des prêtres en tant que
conseillères spirituelles.
Il est grand temps de faire découvrir
l’importance de la spiritualité féminine pour l’Eglise d’aujourd’hui, comme un
élément indispensable de sa sainteté, et de rendre possible aux femmes d’y
apporter la grande diversité de leurs charismes et de jouer leur propre rôle spirituel
dans l’Eglise.•
SOURCE
UMOFC Newsletter août 2000
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