Dans la Grèce antique, il faut préciser
pour spécifier la supériorité de la beauté masculine que les qualités du jeune
garçon ou de l’homme diffèrent en tous points de celles de la femme. Celle-ci
est « tantôt assimilée à l’enfant, tantôt au barbare, voire à l’animal »
De plus ce que la cité grecque exige des
femmes, c’est la réserve et la discrétion. « Sa parure la plus grande est
[donc] le silence. (...) [Et] le plus grand éloge que l’on puisse faire d’une
femme, disent les auteurs anciens, est qu’elle ne fasse pas parler d’elle
(...). Est associé [ainsi] au féminin tout ce qui est posture de soumission et
passivité (...) ». Dans la culture grecque en effet, la femme n’a que peu d’importance
en tant qu’épouse. Sa vie s’organise autour du métier à tisser et de l’éducation
de ses enfants, plus précisément des garçons jusqu’à 7 ans. « La quenouille,
outil de la fileuse est l’un des attributs de la femme, dès le monde homérique
(...) » .
La femme légitime n’a de rapport avec
son époux que dans le but de procréer, à tel point que même la discussion entre
mari et femme est relativement rare. Par contre quand il est avec une
courtisane, l’homme peut avoir une relation plus proche de celle qu’il
entretient avec un jeune garçon. La courtisane est appelée, hétaïre, le terme
est d’ailleurs le féminin du terme masculin hétaïros qui signifie compagnon.
L’hétaïre est donc la compagne de l’homme dans les banquets, lieu de musique,
de danse, de poésie, de discussions et d’amour. Son rôle est de susciter le désir
masculin, elle est donc formée à ce type de pratique. Mais alors que la femme légitime
n’a reçu aucune éducation autre que celle dispensée par sa mère, l’hétaïre étrangère
et donc non-citoyenne, reçoit une éducation lui permettant d’avoir des échanges avec les hommes qui ne se limitent pas à la
seule relation sexuelle.
Aspasie, compagne de Périclès en est un
exemple. Elle va l’influencer dans ses décisions. Comme certaines hétaires qui
donnent des leçons de philosophie ou de science politique à de jeunes hommes,
Aspasie a ouvert une école pour former des jeunes filles. Son enseignement est
composé de cours de techniques érotiques, mais aussi de poésie, de danse. Si ce
type de femme n’est pas l’égal de l’homme, son statut est néanmoins proche du
jeune garçon.
Mais de manière générale, il faut
souligner que si la femme a essentiellement pour rôle de donner naissance à des
enfants, c’est aussi parce que « l’amour est plutôt réservé aux relations
masculines. Aimer les femmes est un signe de faiblesse et de féminitude,
et le modèle du séducteur de femmes, Pâris,
l’amant d’Hélène, passe pour un efféminé.
Quant à aimer sa propre femme, au Ve
siècle avant notre ère, c’est un grand ridicule». Par contre, les rapports
entre les hommes et les jeunes garçons est tout autre. L’éducation des jeunes
garçons est nourrie par l’art, la philosophie et la pratique sportive.
D’ailleurs au gymnase, des salles de discussions permettent aux philosophes et
aux poètes de s’entretenir avec les jeunes. Dans ces salles, des statues
grecques représentent l’idéal de beauté. La beauté des jeunes garçons est mise
en valeur lors des fêtes, des compétitions sportives ou des banquets. Ils s’y
présentent le plus souvent nus. Notons d’ailleurs que le terme gymnase, gymnos
en grec renvoie à la nudité. Or, « la nudité est symbole de beauté et de
puissance, (...) [c’] est une preuve de civilisation, [alors que] les barbares
sont ceux qui sont habillés (...) [dans la mesure où le fait d’avoir] honte de
son corps est une preuve de barbarie. (...).
Pour les grecs, les exercices sportifs
dans les palestres nécessitaient une nudité intégrale, mais elle ne s’appliquait
qu’aux hommes. Si l’homme nu ne choquait pas, la femme nue scandalisait (...)
». « L’opposition du nu et du vêtu recoupe l’opposition du masculin et du
féminin. La beauté masculine est corporelle, la beauté féminine réside dans le vêtement
et se résume à son visage, sinon à sa chevelure ». « Dans l´éducation grecque,
la gymnastique, en sculptant et en ciselant les muscles, associée aux massages
d´huiles parfumées, aux soins des cheveux et de la barbe suffit à rendre beau naturellement.
Le fard relève du simulacre, du mensonge et de l´illusion : il ne donne qu´une
beauté éphémère, inauthentique et insignifiante».
Comme le montrera Xénophon la beauté
masculine est supérieure à toute beauté féminine, car « la beauté juvénile des garçons, qui fascine les Grecs, est
définie comme beauté naturelle.
Inversement la beauté féminine est dite
artificielle et s’obtient par artifice ». Le maquillage des femmes : « teint
blanchi de céruse, yeux charbonnés, pommettes et lèvres d’un rouge violent » en
est une constante. « De fait la représentation grecque de la femme oscille
entre deux pôles : d’une part c’est une créature sauvage qu’il faut domestiquer
et civiliser pour l’intégrer à la société par le mariage, d’autre part c’est une
créature hyper artificielle qui séduit l’homme. Dans les deux cas, l’homme veut
la femme artificielle, jamais naturelle, jamais mise à nu. Elle doit donc
également se vouloir artificielle : bien habillée, maquillée, (…) parée et
bijoutée» .
extrait
de L’Etre féminin ou le fondement ontologique de la laideur.
Par
Claudine Sagaert
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