"" de Karen CAYUELA
Je suis créatrice de lingerie féminine et ma
démarche éthique -non conventionnelle- emprunte un sentier atypique et novateur
en terme de marketing. Il est manifestement laborieux de semer des
graines de féminité dans un univers sexiste saturé de codes et de conditionnements.
J'ai commencé à créer de la lingerie alors que
je cheminais moi-même vers les insondables profondeurs de l'identité féminine
et son alchimie interne.
Au tout début, je confectionnais des culottes et
des protections féminines lavables, veillant à insuffler douceur et
bienveillance à notre intimité. Je focalisais sur la région du bassin, le «
palais de jade », lieu alchimique qui cuisine et détermine nos cycles.
Puis je lançais une gamme de « culottes de
célébration » pour le temps des Lunes : davantage élaborées, raffinées, un fond
rouge invitant le flux à s'y déposer. Actuellement, une collection " Parure des
premières Lunes " est en gestation, pour célébrer avec charme et
coquetterie le passage de la fillette à la jeune fille qui accueille ses menstruations
pour la première fois.
De fil en aiguille, je confectionnais de petites
nuisettes, puis toute une collection de lingerie pour nous relier à notre
puissance, celle qui se loge en notre centre et que nous avons besoin de
réveiller pour libérer la force vive de " la que sabe "[1]. Dès lors,
je me suis affirmée un goût pour l'ostentatoire, vers une féminité authentique
et radieuse qui révèle le corps et le célèbre, où la singularité de chacune est
reconnue. Les collections sont éthiques (matières nobles,
bio ou recyclées privilégiant les petites manufactures), joyeusement raffinées
et d'une belle coloration glamour. Je souhaite attirer la curiosité des femmes vers
une nouvelle conception de leur féminité car envisager aujourd'hui une hygiène
féminine alternative, c'est s'éveiller aux mystères de notre corps et à la
dimension sacrée du Féminin.
Les « Dessous » désignent communément ce qui est
caché, secret, intime. Ils dissimulent nos attributs féminins -nos richesses,
nos monts et merveilles- et les protègent. Il est indispensable de choisir une
lingerie confortable et saine pour préserver notre hygiène intime, tout autant
qu’élégante et sensuelle pour sublimer notre féminité.
Il m'est arrivé de remarquer que, bien souvent
dans les milieux alternatifs les femmes privilégient l'écologie du corps au
détriment de la coquetterie, tandis que dans les milieux urbains les femmes
accordent davantage d'importance à l'apparence en omettant de se relier à leur
matrice -l'utérus- siège de l’essence féminine.
J'ai récemment visité le salon International de
la lingerie, cet énorme business planétaire.
La tendance " sexy " est revendiquée
et s'intensifie ! Les stands, entièrement fermés, rappellent de minis maisons
closes devant lesquelles de jeunes filles en dessous minimalistes font office
d'hôtesses, déambulant dans les allées parmi les visiteurs. Sur les brochures ou les catalogues, les jeunes
femmes affichent des poses indécentes, lèvres entrouvertes et cuisses
invitantes. Pour séduire le consommateur, les médias abusent de l’archétype de
la femme fatale et sulfureuse pour n'en extraire qu'une caricature. L'intimité
-exposée à gros renforts d'artifices- est ainsi banalisée. Choquante. On voudrait nous faire croire qu'être « sexy »
est notre véritable pouvoir. Le paradoxe est qu'une femme aime être
désirable, en étant toutefois respectée, reconnue et appréciée pour sa
singularité.
Ces stéréotypes nuisent gravement à l'estime de
soi. Les femmes y perdent leur âme, se vouant au culte de la minceur, de la
séduction et de la jeunesse éternelle (les filles deviennent sexuellement
attractives précocement puis développent le complexe de vieillir), générant des
rivalités féminines à en sacrifier leur sororité !
Pourtant les femmes aiment la sexualité ; mais
de la même façon qu'une femme achète de la lingerie affriolante pour plaire à
un homme (« faire plaisir » au détriment de « se faire plaisir »), elle ignore
bien souvent -ne l'ayant pas préalablement exploré pour elle-même- la richesse
et la profondeur de son propre plaisir sexuel. Les Femmes sont des êtres charnels, tout autant
parcourues par les frissons du désir que peuvent l'être les hommes.
Notre difficulté réside dans la méconnaissance
de nos chemins de jouissance. Pour exulter, il nous est demandé de rompre avec le
« faire-plaisir » ou le « faire-comme-il-faut » et oser se dévoiler à soi-même. Imaginez une femme qui s'offre de la lingerie
pour elle-même, juste pour contacter le velouté de la soie caressant sa peau,
et s'offrir un moment privilégié, se sensualiser, se trouver BELLE. De la même manière, une mère achètera des
couches lavables bio pour son bébé et continuera à utiliser des tampons et
protections jetables néfastes à sa santé.
Réintégrer que nous sommes des êtres
primordiaux, forts et lumineux -et non le « sexe faible »- commence par la
reconnaissance de notre nature féminine et la reconquête de nos pleins
pouvoirs. A l'inverse des hommes, la force des femmes se
trouve à l'intérieur ; ainsi que notre sexe est caché, notre force vive se loge
au dedans.
Le corps tel qu'idéalisé aujourd'hui est bien
loin de l'image des Vénus préhistoriques, représentions du féminin fécond. Au
milieu de cette faune, les modèles féminins positifs médiatisés manquent
cruellement. Difficile de s'affranchir des normes pour contacter
l'Amour de soi parmi ces clichés coercitifs. Assurément, les femmes ont besoin de se sentir
belles et désirables, mais la barre est placée tellement haut dans l'imagerie
collective qu'elles ont du mal à déceler leur propre beauté au milieu de ce
fatras avilissant.
Incarner sa féminité aujourd'hui est un acte
courageux.
Oser être Soi.
Contacter sa force intérieure puis descendre au
plus profond de soi...
C'est une musique qui se joue pour soi et qui se passe d'artifices...
Femmes, oserais-je vous insuffler d'avoir votre
féminité à cœur...
[1] la que sabe : celle qui sait
Extrait
de la revue REVE DE FEMMES http://www.revedefemmes.net/
karencayuela@gmail.com
http://reineka-couture.me/blog/
Extrait
de la revue REVE DE FEMMES
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