Pour ce chevalier qu'elle appelle depuis
son adolescence, la femme a reçu un autre pouvoir étonnant: sa sexualité.
Ces chairs académiques, cette aura
fluidique, cette chaleur calorique, cette coquetterie, ce regard, ce charme,
bref: ce sex-appeal solaire. Le temps des
mammouths nous en a laissé témoignage avec l'image des déesses-mères sculptées
dans la pierre, l'os ou l'ivoire, statuettes de femmes nues, en pleine
maturité, aux caractères sexuels fortement accentués: la Vénus de Lespugue, la
Vénus de Willendorf.. signe évident d'un pouvoir naturel.
Or, ce qui frappe aujourd'hui, c'est de
voir combien la femme s'enferme en son féminisme de droit, et qu'au lieu d'y
libérer sa naturelle puissance, elle se limite dans le système qui la limite,
où à long terme elle ne peut que mortifier ses particuliers pouvoirs.
Les ouvrages qu'elle accepte sur sa
libération sexuelle, ne sont souvent que des ordinateurs, des compilateurs qui
ne désignent que l'objet. Rien n'y peut lui rehausser le coeur. Ce n'est pas le
ciel. Comment croire que ces livres abattent les murailles des mentalités, des
tabous et des psychoses, dressées par le langage culturel de l'homme: droit
coutumier + droit romain + droit bourgeois + droit à la ségrégation + droit du
patron + droit à la culture masculine + droit des chapelles, des églises +
droit du voisin, plus pour finir, le droit à la libération commune, ce ras le
bol!
Et comment les leçons de sexothérapie
pourraient-elles lui ouvrir le ciel au féminin, si n'y est pas montré le
langage de sa nature?
La nature ne connaît ni l'interdit, ni
le licencieux. Elle initie. Elle avance. Elle informe. Ni le laxisme, ni
l'abstinence ne seront aussi efficaces. Elle n'a pas créé un problème sexuel.
Elle parle pour cette communication par sexualité, le langage prévu tout
naturellement pour allumer le feu - fi! Des pruderies et des bondieuseries - et
assurer la magnificence de l'espèce. Le reste n'est que maquillage.
C'est pourquoi la nature affirme la
«déesse érotique». C'est tout clair. Il n'est à la femme que de se regarder. Eve
fut créée d'Adam, dit la tradition. Sous l'observation physiologique (il en est
d'autres), on voit qu'il donna à Eve le radical chromosomique féminin, pour son
rôle de formatrice de vie. Elle est: XX. Doublement femelle. Lui, le donneur,
pour le pouvoir donner cet X, est nécessairement: XY. Pas complètement
masculin! Flou.
Dans le même temps, Eve se saisit de
l'apparence génitale d'Adam. Ceci lui donne une double activité sexuelle:
masculine donc, par ce clitoris; et féminine, vaginale. Une ambivalence* qui
explique certains aspects du féminisme.
Ce n'est pas tout! Le plus fort dans
l'histoire, c'est qu'Eve possède ses cellules sexuelles dès le ventre de sa
mère. Le garçon, lui, attendra sa quatorzième année pour en être muni et
devenir mâle. La petite est déjà femme à sa naissance, comme on le voit dans
les crèches. Elle a, pour faire image, quatorze années d'avance sur l'homme,
quant à son apprentissage érotique.
(La science initiatique considère Adam
comme le nombre 1 et Eve comme le nombre 2. Elle y voit la profondeur de la
dualité du principe féminin, lié autant aux ténèbres qu'à la lumière (ainsi
peut-on le lire sur le Sceau de Salomon): mystère cosmogonique que seuls les
Initiés sont capables de nous éclairer' Aussi peut-on comprendre le voile posé
traditionnellement sur la femme.)
Cet état des choses fait que l'homme -
j'en suis - ressent un trouble profond par le regard d'une femme. Peut-être ne
trouve-t-il pas assez de virilité pour répondre à tant de féminité. Ou, sur un
autre plan, pas assez de féminité pour répondre à tant de masculinité. Il
ressent étrangement le pouvoir de la sexualité globale de la femme alors que la
sienne n'est que focale. Car cette sexualité de la formatrice de vie,
nécessairement globale pour former le vivant, ne peut se réduire au coït et à
l'orgasme, qui sont l'activité frustre de la sexualité de l'homme,
nécessairement focale pour faire jaillir d'un point le germe de la vie. L'une
ne peut se vivre comme l'autre.** [L'incompréhension de la globalité sexuelle
féminine, et la difficulté qu'éprouve alors la femme à passer du stade
clitoridien (superficiel), au stade vaginal (profond), sont des facteurs de
frigidité.]
La nature affirme aussi la «magna mater»
et la laisse libre du choix de sa maternité. Voyez. La Gallipyge (Grèce) a de
belles fesses (c'est l'étymologie). On peut la voir dans les dictionnaires et
les parcs de châteaux. Le bassin en amphore sensiblement plus large que les
épaules, elle veut porter de beaux enfants. C'est elle, la «mère poule». Elle
est pour la vie vivante, familiale, nombreuse. Les grandes tablées et un homme
solide.
La Vénus (Rome) se rencontre dans de
nombreux sanctuaires. Elle semble faite pour les concours de beauté. C'est la
miss quelque chose. Le bassin et les épaules dans la même courbe et la taille
fine. Il lui faut de l'amour, du plaisir, un homme (un enfant peut-être pour
assurer ce couple). C'est la plus répandu dans les rues. Elle est pour la
chaleur.
La Diane (Rome) est la divinité
chasseresse. Pour tirer à l'arc, elle a des épaules solides et larges, des bras
musclés, des petits reins serrés et des cuisses dures. Elle est faite pour
mener les hommes ou les imiter. Elle veut bien de l'amour mais pas dans
l'abandon. Sa vie peut se passer d'enfants car elle a ceux des autres, et ce
n'est pas plus mal.
Elle donne dans le social. Elle est pour
la lumière. En réalité, dans la rue, on passe sans solution de continuité d'un
type morphologique à l'autre, comme dans le Sceau de Salomon on passe
progressivement d'un triangle à l'autre (le triangle descendant représente le
masculin, la ceinture scapulaire, la ligne des épaules; le triangle remontant
représente le féminin, la ceinture pelvienne, la ligne du bassin). Il est significatif que la morphologie soit
marquée par le destin biologique sexuel. Plus nette chez la femme, parce
qu'elle a une morphologie de matrice, comme un vase, comme l'ovule. L'homme,
lui, a une morphologie de donneur (viscéro-somato-cérébro) qui correspond davantage
à des lignes énergétiques, comme les spermatozoïdes.
Dans cette observation, nue devant son
miroir, la femme peut se dégager du langage de l'homme, et retrouver celui de
la nature, où tout est la représentation du vivant, des atomes aux étoiles, où
son ovule est la représentation de tout le féminin cosmique, des galaxies aux
pétales. Fabuleuse réalité analogique, impressionnante virginité, où pour être
femme à part entière, la formatrice de vie se doit de se sentir représentante
sur le chemin de sa voie royale: ovulation, conception, fécondation,
gestation... naissance! Cette filiation commence dès l'instant qui préside au
choix de la vie, par cet époustouflant cycle ovarien, qui module en elle les
voies endocriniennes, les sécrétions des glaires cervicales, l'aspect du col de
l'utérus, dans un corps qu'il lui faut reconnaître. Et, ces menstruations
vénusiennes, purifiantes, qui la délivrent des lourdeurs, et des marées
psychiques si elle le veut.
Ce corps : ni le mépriser, ni le nier,
ni l'éviter. Le regarder. L'aimer, sachant qu'aucune nous ne peut se dégager de
sa structure sexuelle, ni de sa répercussion sur le psychisme.
Ainsi, même si la femme n'est plus
considérée comme Vénus parce que l'ambiance n'est plus au sacré, même marquée
des contraintes qu'elle a subies, des fantasmes, des frustrations, des
questions qui ceinturent son destin biologique sexuel, pour se délivrer
d'elle-même, il lui reste l'essentiel: cette représentation du féminin cosmique.
Elle est la «déesse érotique» et la «magna mater», à part entière.
C'est le droit de la nature. Et pour
exprimer ce droit qui rassemble son fondamental besoin biologique de l'homme,
et l'infini besoin de son image solaire, la formatrice de vie a reçu un autre
pouvoir, étonnant.
*
LA DÉESSE ÉROTIQUE Eros, dieu grec de l'amour-, Platon distinguait: l'Eros
supérieur de l'amour divin, et l'Eros inférieur de l'amour humain.
Extrait
de LE POUVOIR FORMATEUR DE LA FEMME
Par
Pierre C. Renard 1996
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